A. BURGOT (Ulule) : «Depuis octobre 2010, plus de 15.600 projets ont été financés avec succès»

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Chaque année, le DigiWorld Summit est le rendez-vous des acteurs du numérique. A cette occasion, nous avons rencontré Arnaud BURGOT, Directeur général d’Ulule, la 1ère plateforme de financement participatif européenne. Il nous dresse le portrait-robot du secteur et ses opportunités de croissance.

média+ : Le crowdfunding (ou financement participatif) est-il arrivé à l’âge de raison ?

Arnaud BURGOT : Non, nous en sommes très loin. Ulule ne fonctionne pas comme WhatsApp ou Snapchat qui sont des applications à l’usage simplifié pour une adoption immédiate et massive. Le financement participatif quant à lui, touche l’intime et l’argent. Prenons l’exemple de la musique. Avant l’ère du digital, un producteur investissait de l’argent sur un artiste dans lequel il croyait. Il visait ensuite la rentabilité sur les ventes. Le producteur assurait donc la monétisation d’un contenu avant même de le créer. Quand le digital est arrivé, il a remis en cause ce schéma de post-monétisation. Le crowdfunding a débarqué au même moment avec un nouveau modèle. Ainsi, on s’est retrouvé avec des artistes indépendants. Ces derniers créent des contenus, les mettent en ligne et acquièrent une audience. Ne pouvant pas faire face à un modèle gratuit sur le long terme, le financement participatif s’est imposé comme le modèle de pré-monétisation de la création par excellence.

média+ : Les grands médias, producteurs de TV ou de cinéma commencent-ils à utiliser Ulule en vue d’assurer un complément de financement ?

Arnaud BURGOT : Très peu ! Sur l’audiovisuel ce sont massivement les indépendants qui utilisent ce modèle. Pour comprendre, il faut bien capter la réalité de l’industrie. Le schéma habituel consiste pour un producteur de financer un projet par le biais d’une chaîne, du CNC et d’un distributeur auquel il prévend les droits de distribution. L’audiovisuel grand public est particulièrement bien financé grâce aux mécanismes du CNC et du crédit d’impôt. Les producteurs français n’ont pas la nécessité absolue de se tourner vers ces outils participatifs. En revanche, tous ceux qui sont totalement en dehors du système en profitent. Ils viennent essentiellement du Web : YouTubeurs et créateurs de web-séries. Si un long-métrage se montait en crowdfunding, cela nécessiterait à la fois beaucoup d’argent, que le producteur initie le projet, et qu’il est ait la compétence de communiquer auprès du grand public. Cette compétence aujourd’hui, il ne l’a pas, contrairement au distributeur.

média+ : Quelle la moyenne du financement d’un projet sur Ulule ?

Arnaud BURGOT : La moyenne est de 4.600 € contre 3.600 l’année dernière. La croissance est importante. Après, il y a de fortes disparités selon les types de projets. Les particuliers récoltent en moyenne 3.000 €, les associations 5.000 €, les sociétés commerciales 13.000 €. Depuis le lancement d’Ulule en octobre 2010, ce sont plus de 15.600 projets créatifs, solidaires et innovants qui ont été financés avec le soutien d’internautes de 195 pays. Cela représente 67% de réussite. Il s’agit du plus gros taux de succès de toutes les plateformes généralistes. Notre spécificité est d’accompagner les porteurs de projets avec un coach attitré qui les aident à bien utiliser l’outil. Ulule est déclinée en 7 langues (français, anglais, italien, espagnol, allemand, portugais et flament). Le gros de notre activité reste francophone en France, Belgique, Suisse et Canada francophone.

média+ : Où se situent vos nouvelles opportunités ?

Arnaud BURGOT : Notre plan de bataille pour les 24 mois à venir, est de nous étendre en Espagne, Italie, Allemagne et Belgique avec des équipes locales et l’ouverture de filiales. Notre mission est d’aider les porteurs de projets à concrétiser leurs envies. Quand on s’associe à des marques partenaires, nous voulons que ces dernières apportent quelque chose de plus. C’est le cas de BNP Paribas sur des projets entrepreneuriaux, MAIF sur des projets solidaires, Fleury Michon sur des projets alimentaires ou encore La Française des Jeux sur un appel à projet sportif féminin. Enfin, les futures opportunités seront sûrement tournées vers de nouveaux outils de paiement. Le jour où l’on pourra soutenir un projet directement dans un partage Facebook, cela accélèrera l’expérience.