«A Ghost Story» avec Casey Affleck, un film troublant et poétique sur le deuil et le poids de l’existence

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Couvert d’un drap blanc troué, l’acteur américain Casey Affleck est un fantôme qui n’arrive pas à se résoudre à partir dans «A Ghost Story», en salles mercredi, un film troublant et poétique sur le deuil et le poids de l’existence. Oscarisé en début d’année pour son rôle de père meurtri dans «Manchester by the sea», Casey Affleck est C., un musicien marié à M. (interprétée par Rooney Mara) devant la caméra de David Lowery, qui les avait déjà réunis en 2013 dans «Les Amants du Texas». 
Le jeune couple habite une maison isolée à la campagne et se dispute sur un possible déménagement. Un accident de voiture (résumé en un plan silencieux, à l’image du film) met fin à leurs projets. Décédé, C. devient un fantôme, qui hante la maison où il a vécu. 
Ovni d’1h30, repéré au festival du film indépendant de Sundance puis au festival américain de Deauville, ce petit film est «une tentative littérale de faire la paix avec le temps qui passe», selon son réalisateur David Lowery. Il a commencé à travailler dessus au lendemain de la fin du tournage du film à gros budget «Peter et Elliott le dragon» de Disney. 
Dans «A Ghost Story», le fantôme incarné par Casey Affleck assiste, impuissant, à la nouvelle vie de celle qu’il aime, à l’emménagement d’une mère de famille hispanique et de ses jeunes enfants dont il va troubler le quotidien puis à l’installation d’étudiants fêtards, aimant disserter sur le sens de la vie. Jouant souvent des personnages intériorisant leurs émotions, l’acteur est l’un des rares à pouvoir communiquer autant avec un drap sur la tête, que sans, a jugé le critique de «Variety», Peter Debruge. 
Filmer Casey Affleck «sans qu’il apparaisse ridicule ou cartoonesque n’a pas été une partie de plaisir non plus», concède le réalisateur. «Il a fallu sans cesse revoir les plans qu’on avait prévus. C’est devenu un processus d’apprentissage permanent: on ne filme pas un fantôme comme un être humain», souligne-t-il dans les notes de production du film. 
Sombre et existentiel, «A Ghost Story» ne s’appuie pas sur les codes du film d’horreur malgré quelques grincements de portes et autres objets cassés et laisse plutôt à voir la solitude d’un fantôme inconsolable, qui va voyager à travers les époques et hanter les spectateurs. 
Alors que les locataires se succèdent dans la maison, lui se montre incapable de partir. Quasiment sans parole, mais ponctué de musique, le film laisse le spectateur projeter ses propres peurs et s’interroger sur le sens de l’existence, sur ce qui reste des morts. Il évoque par certains aspects les films de Terrence Malick, Palme d’or en 2011 pour «The Tree of life» et avec lequel Rooney Mara a récemment collaboré («Song to song»). 
«A Ghost Story» a été quasi-entièrement tourné pendant deux mois à Dallas (Texas) et s’inspire d’une dispute entre le réalisateur et sa femme sur l’endroit où ils devraient vivre. Visuellement, il bénéficie d’un format 4/3 qui confère un aspect suranné à l’ensemble, avec des images aux coins arrondis, comme des photos d’antan.