Christopher Wylie, le lanceur d’alerte qui a mis Facebook dans la tourmente

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World Economic Forum, WEF, in Davos, Switzerland - 20 Jan 2017
Mandatory Credit: Photo by GIAN EHRENZELLER/EPA/REX/Shutterstock (7916860az) The facebook logo inside the facebook Chalet on the sideline of the 47th annual meeting of the World Economic Forum, WEF, in Davos, Switzerland, 20 January 2017. The meeting brings together enterpreneurs, scientists, chief executive and political leaders in Davos January 17 to 20. World Economic Forum, WEF, in Davos, Switzerland - 20 Jan 2017

Il a contribué à créer la société d’analyse de données Cambridge Analytica (CA), mais pris de remords, il dénonce aujourd’hui ses dérives: Christopher Wylie, un Canadien de 28 ans est le lanceur d’alerte qui a mis Facebook dans la tourmente. Le jeune homme est un être «intelligent», «drôle», «vorace intellectuellement», a raconté Carole Cadwalladr, journaliste du «Guardian», qui a collaboré un an avec lui. Avec les éléments qu’il lui a apportés, elle a révélé que CA récoltait les profils Facebook de millions d’utilisateurs aux Etats-unis et utilisait leurs informations pour élaborer des profils politiques et psychologiques, ensuite ciblés avec des messages politiques afin de peser sur leur vote, un scoop partagé avec le «New York Times» et «Channel Four». Wylie a quitté l’école à 16 ans, sans diplôme, mais dès l’année suivante s’est retrouvé à travailler pour le chef de l’opposition canadienne. Cheveux teints en rose, lunettes noires à grosses montures carrées et anneau au nez, il est à la fois un «conteur de génie», un «politicien» et un binoclard féru d’informatique, qui a appris à coder tout seul, écrit Carole Cadwalladr. Wylie se décrit lui volontiers comme «le Canadien homosexuel et végétarien qui a créé l’outil de guerre psychologique de Steve Bannon», ex-conseiller de Donald Trump et qui, selon le jeune homme, était impliqué dans CA. Après son abandon précoce de l’école, il a gagné Londres pour reprendre ses études, d’abord le droit à la London school of Economics puis la mode avant d’être embauché en juin 2013 comme directeur de recherche pour la société Strategic Communication Laboratories (SCL), maison mère de CA, qu’il a contribué à créer. «Oui, j’ai aidé à créer cette boîte», a-t-il expliqué dans un entretien à plusieurs journaux européens. «Le fait est que j’ai été happé par ma propre curiosité, par le boulot que je faisais. Ce n’est pas une excuse mais je me retrouvais à faire le travail de recherche que je voulais faire, avec un budget de plusieurs millions, c’était vraiment très tentant», selon ses propos publiés mardi par le quotidien français «Libération». Au départ, les «voyages à travers le monde», les rencontres avec «des ministres de toutes sortes de pays» et son travail de recherche lui plaisent. Mais il a dit avoir découvert au bout de quelques semaines que son prédécesseur était mort dans un hôtel kenyan dans des circonstances inexpliquées. «Les gens soupçonnaient un empoisonnement», a-t-il déclaré mardi aux membres d’une commission parlementaire britannique enquêtant sur les «fake news». Pour s’exprimer devant les députés, il avait troqué ses habituels T-shirts flashy pour un sobre costume-cravate et a déroulé pendant plusieurs heures ses accusations contre CA, qu’il a quitté en 2014. Il a raconté s’être décidé à parler peu après l’arrivée au pouvoir de Donald Trump, un «déclic» montrant l’«impact» que pouvait avoir, selon lui, le détournement de données personnelles à des fins politiques. Et s’est dit «incroyablement pris de remords» par le rôle qu’il a joué dans CA. Christopher Wylie a aussi encouragé les députés à enquêter sur AggregateIQ (AIQ), une entreprise canadienne que Wylie lie au groupe SCL. Il se dit «absolument» certain que AIQ a utilisé les bases de données de CA lors de la campagne du référendum sur le Brexit, au profit d’organisations faisant campagne pour la sortie du Royaume-Uni de l’Union européenne. Affirmant avoir été partisan du Brexit – «malgré mes cheveux roses et mon anneau dans le nez, je suis l’un des rares spécimens d’eurosceptiques progressistes» – il s’est dit attaché à ce que «l’intégrité du processus démocratique» soit respecté. CA a vigoureusement nié les accusations à son encontre. Dans un communiqué, l’entreprise affirme que Christopher Wylie n’était qu’»un employé à temps partiel qui a quitté ses fonctions en juillet 2014 et n’a aucune connaissance directe de notre travail ou de nos pratiques depuis cette date». Christopher Wylie a lui affirmé aux députés que CA n’était pas une «entreprise légitime».
«Je ne pense pas qu’ils devraient continuer à faire des affaires».