Coluche : 30 ans après, ce clown conserve une popularité intacte

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C’est l’histoire d’un «mec», Coluche, mort le 19 juin 1986 dans le choc de sa moto avec un «putain de camion», sur une départementale des Alpes-Maritimes. Michel Colucci, bouffon professionnel, avait 41 ans. Il préparait un nouveau spectacle pour sa rentrée au Zénith, après une parenthèse de près de 5 ans pendant laquelle il avait fait de la politique, du cinéma, de la radio, des blagues et même créé les Restos du Coeur, inventés pour une saison en 1985 et, hélas, toujours très actifs. Le 24 juin, l’homme à la salopette à rayures avait eu un «bel enterrement» à Montrouge (Hauts-de-Seine), où se pressaient motards, gens du show-biz, anonymes et politiques, comme un résumé de sa vie. Trente ans après, ce clown à l’esprit pétomane, conserve une popularité intacte. Il faut dire qu’il disposait d’une arme de séduction massive, une drôlerie parfois limite mais sans limite. «Je suis capable du pire comme du meilleur. Mais, dans le pire, c’est moi le meilleur», disait-il. Il est né le 28 octobre 1944 à Paris, près de la porte d’Orléans, d’un père ouvrier (mort quand il avait 3 ans) et d’une mère femme de ménage. Il n’était pas allé bien loin pour commencer sa carrière d’homme de spectacle, en 1969, rue d’Odessa, au Café de la Gare (Montparnasse).  Ce café-théâtre, dirigé par Romain Bouteille, a été un vrai conservatoire du spectacle : Les Dewaere, Miou-Miou, Gérard Lanvin, Renaud, Anémone, Josiane Balasko, Michel Blanc y ont également débuté. Individualiste forcené, Coluche monte en 1972 sa propre troupe, «Au vrai chic parisien». Il crée «Thérèse et Triste» et «Ginette Lacaze» (où il partage la vedette avec Balasko), 2 comédies loufoques que remarque Paul Lederman, producteur avisé et par ailleurs manager de Claude François et Thierry Le Luron. Il va alors enchaîner les spectacles (L’Olympia en 1973 en lever de rideau de Dick Rivers, en vedette en 1975, Bobino en 1975, le Théâtre du Gymnase en 1978 puis en 1980 où il drainera 600.000 spectateurs). De son vivant, le rondouillard gouailleur ne faisait pas l’unanimité. Il divisait la France en 2 et la ligne de partage ne recouvrait pas forcément un simple clivage politique. Ainsi, la décision de se porter candidat à «l’érection pestilentielle» en 1981 suscita des remous à droite et à gauche. Ce farouche opposant à «l’establishment» vit se dresser contre lui les professionnels de la politique de tout bord et il préféra jeter l’éponge. C’est ce Coluche en campagne qu’a retenu en 2008 Antoine de Caunes pour son film «Coluche, l’histoire d’un mec», incarné par François-Xavier Demaison. Lequel salua alors «la complexité du personnage, sa finesse, son intelligence (et) sa capacité à catalyser une certaine connerie à la française».

Après la parenthèse politique, l’artiste retourna à son vrai métier, celui de «1er amuseur public de France» comme l’avait qualifié l’«International Herald Tribune». Ce «métier», il l’exerça sur scène, à la radio (RMC, d’où il est renvoyé pour insolence envers la famille princière de Monaco, RFM et surtout Europe 1), au cinéma (24 films, tous comiques, à l’exclusion de «Tchao Pantin» de Claude Berri en 1983 qui lui vaut le César du meilleur acteur), et aussi à la télévision (notamment un faux journal télé sur Canal+). Dans ces années 80, il n’était pas toujours très en forme : il divorça, apprit que son pote Patrick Dewaere s’était suicidé (1982) avec le fusil qu’il lui avait offert, a abandonné la scène, plongé dans la drogue. Jusqu’à son comeback au 1er plan avec les Restos du Coeur qui ouvrent le 21 décembre 1985. Il est également à l’origine de «l’amendement Coluche» (voté après sa mort) qui instaure une déduction fiscale pour les dons aux Restos du coeur et autres organismes nourrissant les personnes en difficulté. Coluche aurait 71 ans.