CSA : Mathieu Gallet révoqué de la présidence de Radio France

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Le patron de Radio France Mathieu Gallet a perdu la partie: le CSA a décidé mercredi de le révoquer à compter du 1er mars, tirant les conséquences de sa condamnation pour favoritisme lorsqu’il dirigeait l’INA, et répondant aux voeux du gouvernement qui réclamait son départ. «Le Conseil supérieur de l’audiovisuel, réuni ce jour en assemblée plénière, a décidé de retirer son mandat au président de Radio France Mathieu Gallet et ce, à compter du 1er mars 2018» : c’est par ce bref communiqué publié dans l’après-midi que les sept «sages» du gendarme de la radio et la télévision, réunis depuis le début de la matinée pour trancher le sort de Mathieu Gallet, ont fait connaître leur verdict.Le CSA détaillera plus tard dans la journée les motifs de sa décision, comme le prévoit la loi. Mathieu Gallet était sur la sellette depuis sa condamnation le 15 janvier à un an de prison avec sursis et 20.000 euros d’amende, pour avoir favorisé deux sociétés de conseil lorsqu’il présidait l’Institut national de l’audiovisuel entre 2010 et 2014. Le dirigeant de Radio France, qui n’a cessé de protester de son innocence, avait fait appel et refusé de démissionner, mais la ministre de la Culture Françoise Nyssen avait jugé son maintien en fonctions «inacceptable», et appelé l’intéressé et le CSA à «tirer les conséquences» du jugement. C’est le CSA lui-même qui avait nommé Mathieu Gallet à la tête de Radio France en 2014, à la surprise générale, faisant du fringuant dirigeant de l’INA (qui vient d’avoir 41 ans) le plus jeune patron de la radio publique. C’est un revers sans précédent pour Mathieu Gallet, qui avait jusqu’ici connu une trajectoire météoritique dans l’univers des médias. Il était parvenu à surmonter plusieurs épreuves au début de son mandat à Radio France, notamment une polémique sur le coût de rénovation de son bureau et sur ses dépenses en communication, ainsi qu’une grève historique d’un mois contre des suppressions de poste. Mais il pouvait se prévaloir d’un bilan solide, avec des finances qui devraient revenir à l’équilibre cette année et des audiences record, comme il a eu l’occasion de l’expliquer lors de sa longue audition lundi au siège du CSA.Cette décision est totalement inédite pour le CSA, qui n’avait jusqu’ici jamais eu à lancer une procédure de révocation d’un dirigeant de l’audiovisuel public. Le choix était cornélien pour le régulateur, alors même que l’exécutif prépare une réforme en profondeur de l’audiovisuel public. En écartant Mathieu Gallet, le CSA court le risque de paraître céder à une injonction du gouvernement, et s’expose à un probable recours de l’intéressé devant le Conseil d’Etat. Mais à l’inverse, s’il l’avait maintenu à son poste, le CSA aurait pu se voir reprocher de chercher à défendre à tout prix son indépendance et un manque de fermeté sur la question de l’éthique. Comme s’y est récemment engagé son président Olivier Schrameck, c’est le CSA qui désignera le successeur de Mathieu Gallet, un processus qui prendra plusieurs mois. En attendant, c’est le doyen des administrateurs de Radio France nommés par le CSA qui assurera l’intérim à la tête du groupe public. Il s’agit de Jean-Luc Vergne, 69 ans, ancien DRH de plusieurs grands groupes (Sanofi, Elf Aquitaine, PSA, BPCE), qui n’avait pas d’expérience de l’audiovisuel avant d’intégrer le conseil d’administration de Radio France, fin 2016. C’est la 1ère et la dernière fois, a priori, que le CSA exerce son pouvoir de révocation des dirigeants de l’audiovisuel public, puisque le gouvernement veut donner aux conseils d’administration des groupes concernés le droit de nommer et démettre leurs présidents. La mesure devrait figurer dans un projet de loi qui sera présenté d’ici la fin de l’année. D’ici là, «c’est au CSA qu’il incombe selon la procédure prévue par la loi de désigner le président de Radio France», avait expliqué M. Schrameck la semaine dernière, ajoutant que «la loi peut changer, mais aujourd’hui elle n’a pas changé».