Les décalages de diffusion peuvent compliquer le mondial 

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Messi vient de marquer en Russie, les voisins hurlent leur joie mais le but de l’Argentin se fait encore attendre sur votre écran: les décalages existant entre chaînes, mais aussi entre la télévision et les mobiles, peuvent compliquer le Mondial des amateurs de foot. Les fenêtres ouvertes à l’approche de l’été, les téléspectateurs de tous les pays où la télévision est passée au numérique constatent que la notion de direct est en fait relative. Pendant la Coupe du monde 2018, le signal vidéo est envoyé par satellite depuis les stades russes vers les chaînes du monde entier, en six dixièmes de secondes environ, explique Gaëlle Kaminsky, responsable du développement chez le diffuseur français TDF. Chaque chaîne dispose ensuite de son propre matériel pour compresser et encoder le signal vidéo, causant des décalages plus ou moins importants selon les paramètres qu’elle choisit. Elle peut par exemple favoriser la qualité de la transmission au détriment du débit: l’image sera plus belle, mais mettra un tout petit peu plus de temps à parvenir à l’écran. Les images arrivent ainsi sur les récepteurs numériques (la TNT en France) et satellite des fans de foot 4 à 5 secondes après que l’action ait eu lieu dans le stade russe.

«Mieux avant» : Les images diffusées en très haute définition (4K) prennent quelques millisecondes de plus. Et encore une seconde supplémentaire environ pour les box internet, avec un avantage à la fibre par rapport à l’ADSL. Par exemple, pour le match d’ouverture Russie – Arabie Saoudite jeudi, les deux chaînes qui diffusaient le match en France étaient désynchronisées: BeIN avait deux secondes d’avance sur TF1 sur certains écrans.

On peut dire, pour une fois en matière de technologie de l’information, que «c’était mieux avant»: la télévision analogique était légèrement plus rapide d’une seconde par rapport à la TNT actuelle, avec moins de traitement et moins de codage. Mais les techniques d’encodage «tendent à s’améliorer» et ont beaucoup progressé depuis les débuts de la télévision numérique, souligne Gaëlle Kaminsky. Les délais s’accentuent encore sur les autres écrans, la faute à un nouveau retraitement des images avant qu’elles ne s’affichent via les services de streaming (légal ou illégal)… Résultat, le temps s’écoule: Lionel Messi a marqué il y a déjà plusieurs secondes, les smartphones vibrent avec la notification de son but, et l’Argentin a eu le temps de célébrer son geste quand les images s’affichent enfin sur les ordinateurs, tablettes ou téléphones!

Imbattable radio : Des facteurs techniques peuvent même allonger dramatiquement le décalage: la connexion internet peut être mauvaise, les serveurs peuvent être saturés, le réseau 4G défaillant. De quoi manquer plusieurs passes et tirs, avec un retard de 45 secondes à une minute constaté pendant le match d’ouverture regardé sur un smartphone. «Le football a toujours eu une relation privilégiée avec les technologies des médias», rappelle le philosophe Simon Crichtley, auteur de «A quoi on pense quand on pense au foot». Lequel souligne que les technologies ont aussi une influence sur «notre vision du football», un sport qu’on a, par exemple, de plus en plus tendance à regarder comme un jeu vidéo avec le développement des jeux de foot sur consoles. Reste que, pour les fans qui n’ont pas la possibilité d’aller dans les stades russes mais veulent tout savoir en temps réel, le meilleur média pour suivre les matches demeure donc… la radio en FM, qui fait appel à des systèmes de diffusion beaucoup plus légers et donc quasi instantanés.