Un deuxième Oscar pour Alexandre Desplat

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Le compositeur Alexandre Desplat a décroché dimanche son deuxième Oscar pour la bande-originale de «La Forme de l’eau», la romance fantastique de Guillermo del Toro, confirmant sa place aux côtés de musiciens français mythiques comme Georges Delerue, Maurice Jarre ou Michel Legrand. «Guillermo, merci d’avoir laissé la musique être la voix de tes personnages pour transmettre la belle mélancolie de l’amour», a-t-il déclaré sur la scène du Dolby Theater en recevant sa statuette. 
La bande-originale de «La Forme de l’eau» lui a déjà valu un Golden Globe. Ce parisien de 56 ans avait reçu sa 1ère statuette il y a 3 ans pour «The Grand Budapest Hotel» de Wes Anderson. Il est aujourd’hui l’une des valeurs sûres d’Hollywood, avec ses rivaux habituels Hans Zimmer qui était lui nommé dimanche pour «Dunkerque», ou le légendaire John Williams, qui a créé le célèbre thème de «La Guerre des étoiles». «Gagner un Oscar, c’est déjà tellement incroyable pour un Européen et un Français, le premier m’avait beaucoup impressionné, le deuxième arrive sans prévenir, je suis extatique», a-t-il déclaré. «Cette nouvelle reconnaissance internationale pour Alexandre Desplat consacre l’oeuvre d’un compositeur exceptionnel», s’est pour sa part réjouie la présidente du Centre national du cinéma et de l’image animée (CNC) français dans un communiqué. «Son travail avec les réalisateurs du monde entier contribue au rayonnement de la France», a renchéri la ministre de la Culture Françoise Nyssen dans un autre communiqué. Parmi les Français les plus décorés aux Oscars, Desplat reste dépassé par Michel Legrand, lauréat de trois Oscars, dont «L’affaire Thomas Crown», et Maurice Jarre, trois fois oscarisé aussi, notamment pour «Lawrence d’Arabie». Il a en revanche fait mieux que George Delerue, lauréat d’une statuette pour «I love you, je t’aime». Il cite Delerue et Jarre comme ses deux plus grandes influences, «les deux que j’ai rencontrés depuis le début», et «que j’admire vraiment, car ils avaient le désir de transmettre». 
Desplat a déjà une collection de trophées bien fournie, du Bafta aux Grammys Awards en passant par trois César en 2006, 2011 et 2013 pour «De battre mon coeur s’est arrêté», «The Ghost Writer» et «De rouille et d’os». La carrière du maestro à la longue stature s’est internationalisée avec «La jeune fille à la perle» de Peter Webber en 2003, puis «Birth» de Jonathan Glazer, sorti l’année suivante. Dès lors, les projets d’envergure s’enchaînent, avec les plus grands cinéastes, Fincher, Polanski, Frears, Besson, de multiples collaborations avec Wes Anderson ou George Clooney, avec lequel il a travaillé à 3 reprises pour «Les marches du pouvoir» (2011), «Monuments men» (2014) et «Bienvenue à Suburbicon» (2017). Il est l’auteur de plus d’une centaine de bandes originales dont le dernier opus de la saga des Harry Potter. «Etre devant cent musiciens au pupitre tous les jours, debout pendant 9 heures, avec le staff de la Warner et des producteurs en cabine qui attendent que vous les surpreniez, c’est beaucoup de pression», se souvient-il. Le cinéma d’auteur toutefois, «m’a construit», et avec lui ou à Hollywood «la relation avec les metteurs en scène est la même, c’est très intime, dans un studio, la question c’est la justesse par rapport au scénario, à l’image». Pour «La forme de l’eau», il a écarté «toute notion de danger, de science fiction, d’étrange» pour se concentrer sur la romance: «la douleur dans la poitrine quand l’amour est impossible, quand on n’arrive pas à approcher l’être aimé». «Après, c’est l’orchestration, l’instrumentation un peu singulière (…) un univers sonore que l’on crée, (…) une musique qui fait des vagues, des arpèges…», a-t-il élaboré.