Distribution des films: le poids des grands réseaux «faussent» la concurrence

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La «concentration» de la distribution des films dans les mains de quelques grands réseaux de salles «fragilise la filière indépendante» et «nuit à la diversité» des productions cinématographiques, estime un rapport demandé par des producteurs et distributeurs indépendants dévoilé mercredi. «Dépendance économique» des petites salles aux grands circuits, accès parfois plus compliqué pour les films «indépendants» aux grands réseaux, «absence de contrat»: le rapport, commandité par des structures comme l’ARP (Association des auteurs-réalisateurs-producteurs), la Société des réalisateurs de films (SRF) ou la Guilde des scénaristes, conclut à une «concurrence faussée» dans le secteur de l’exploitation des films. La «concentration» de la distribution dans les mains de quelques grands circuits, couplée à une concentration parfois «verticale» lorsqu’un groupe peut à la fois produire, distribuer et promouvoir un film, tend à «pénaliser la création, fragiliser la filière indépendante et nuire à la diversité des films», estime l’auteur du rapport, Pierre Kopp, avocat au barreau de Paris, expert en droit de la concurrence et professeur d’économie à Paris-I. Au niveau national, les trois premiers circuits (Gaumont-Pathé, CGR, UGC) «détiennent 52,1% de parts de marché», souligne l’avocat dans son rapport. A Paris, trois circuits de salles (Pathé Gaumont, UGC, MK2) «détiennent 71,5% des écrans et 88,6% des parts de marché» alors que les salles indépendantes «ne représentent plus que 28,5% des écrans et seulement 11,4% des parts de marché». Ces chiffres sont «bien au-dessus du critère habituel de dominance de la Cour européenne de Justice, pour qui 40% constitue un indicateur sérieux de dominance», souligne l’avocat. Mais au-delà de ces chiffres, d’autres éléments tendent à «fausser» la concurrence, selon le juriste, qui évoque notamment les «effets sur les indépendants» des cartes d’abonnement illimité mises en place depuis le début des années 2000 par les grands circuits. En s’affiliant à ces cartes d’abonnements illimités, les indépendants deviennent des «sous-traitants» des grands réseaux et perdent au passage «une part importante de leur marge, dans l’espoir que l’effet volume compense l’effet prix et maintienne leur rentabilité», observe l’avocat. Le rapport pointe aussi un accès parfois plus difficile aux grands réseaux pour les indépendants ainsi que l’absence de «contrat», qui permettrait aux plus petits producteurs et réalisateurs d’avoir une meilleure visibilité sur la durée et les conditions de distribution de leur film. Les groupes Pathé-Gaumont et UGC, contactés, n’avaient pas réagi à la mi-journée.