«Ebdo» : l’équipe de la revue «XXI» lance un hebdomadaire papier sans pub

608

L’équipe de la revue «XXI» lance vendredi un hebdomadaire 100% papier sans publicité, avec la volonté de suivre son propre agenda, loin des chaînes d’info en continu, un pari ambitieux à une époque où la plupart des news magazines voient leurs ventes fondre. Tous les vendredis, en kiosque et par abonnement, ce journal plutôt petit mais épais (100 pages) va tenter de se distinguer, et pas seulement par son format atypique et sa «2ème une» en 4ème de couverture. «On n’est pas dans la vitesse, on n’est pas dans la surinformation», explique Patrick de Saint-Exupéry, qui a quitté la direction de «XXI» pour prendre la barre d’«Ebdo» avec Constance Poniatowski (ex-directrice de «Version Femina»). La rédaction (paritaire) apportait cette semaine les dernières touches au 1er numéro, officiellement lancé ce mercredi soir. Au menu: une enquête, des reportages, une BD scientifique, un dossier thématique de vie quotidienne («le sel» dans le numéro 0), des chroniques de l’écrivain Emmanuel Carrère et du psychiatre Tobie Nathan, des jeux et une histoire pour enfants. Se revendiquant «accessible à tous», «non-partisan», «fondé sur les faits», «Ebdo» s’est installé dans le quartier parisien des éditeurs de Saint-Germain-des-Prés. Il a recruté une trentaine de journalistes, débutants ou plumes aguerries comme Anne Jouan, ex-journaliste santé du «Figaro», Laurent Valdiguié, ex-rédacteur en chef du «JDD», ou Samuel Forey, grand reporter au «Figaro». «On veut créer un espace de lecture commun entre des gens jeunes ou plus âgés, citadins ou de la campagne, CSP++ ou qui n’ont pas fait d’études supérieures», dit son cofondateur, l’éditeur Laurent Beccaria. «Ebdo» veut «trouver un public au-delà des fans de XXI», revue trimestrielle vendue à 40.000 exemplaires, ajoute Nicolas Delesalle, venu de «Télérama» pour assurer la rédaction en chef avec Gaëlle Macke (ex- «Challenges»). Avec un prix de 3,50 euros le numéro, «Ebdo» se place parmi les moins chers des newsmagazines. Les tarifs d’abonnement seront graduels en fonction des ressources des lecteurs, à partir de 5 euros par mois et sans justificatif, précise son directeur général Thierry Mandon, ex-secrétaire d’Etat socialiste et ami de longue date de Laurent Beccaria. «Ebdo» compte déjà 8.000 pré-abonnés. Les fondateurs ont mûri leur formule avec des méthodes maison: enquête auprès de la communauté de lecteurs de «XXI» et 6mois, ateliers participatifs (le nom du journal a été trouvé par un lecteur), tour de France à la rencontre des lecteurs et financement participatif avec à la clé plus de 400.000 euros, un record pour une publication. Une journaliste au sein d’«Ebdo» est chargée de nourrir cette interactivité. «Le lecteur est sollicité en permanence : on lui demande beaucoup de venir vers nous, de témoigner, de nous dire de quoi il a envie qu’on parle», raconte Constance Poniatowski. S’il ne diffuse pas ses articles sur internet, le journal a un site, «La Source», qui doit permettre aux lecteurs de participer chaque semaine à l’élaboration du journal.Concocté à Paris, «Ebdo» veut aussi voir l’actualité en dehors de la capitale, alors que de nombreux médias sont accusés de «parisianisme». Plusieurs journalistes habitent et travaillent à Lille, Lorient ou Lyon, et proposeront des sujets depuis leur ville. Avec 200.000 exemplaires pour son 1er numéro, le tirage prévu est ambitieux. Pour atteindre l’équilibre financier (15 millions d’euros de c.a.), «Ebdo» vise 90.000 ventes chaque semaine fin 2019: beaucoup moins que «Paris Match» mais autant que «VSD» ou «La Vie». Les fondateurs ont investi dans ce lancement les bénéfices de la revue «XXI». Le journal tient à son indépendance mais va prochainement ouvrir une partie de son capital à des actionnaires individuels, avec des parts de 3 à 5%. Le groupe de presse Bayard, qui doit lancer son propre hebdomadaire à l’automne, a déjà manifesté son intérêt.