«La Forme de l’eau» sacré Oscar du meilleur film 

474

«La Forme de l’eau» de Guillermo del Toro a été sacré Oscar du meilleur film dimanche, remportant au total 4 prix lors d’une cérémonie marquée de vibrants appels contre les discriminations sexuelles et raciales.Autre grand gagnant, «3 Billboards, Les panneaux de la vengeance», primé pour le meilleur second rôle masculin (Sam Rockwell) et la meilleure actrice, Frances McDormand, qui interprète une mère en colère face à l’enquête non élucidée sur le meurtre de sa fille. «La Forme de l’eau», romance fantastique sur une muette travaillant dans un laboratoire gouvernemental secret qui tombe amoureuse d’une créature reptilienne captive, partait forte de 13 nominations et a valu au compositeur français Alexandre Desplat son 2ème Oscar. «C’est merveilleux. Je suis extatique», a déclaré le musicien, rendant hommage à ses «mentors» George Delerue et Maurice Jarre. «J’ai grandi au Mexique, je pensais que ça ne m’arriverait jamais», a pour sa part déclaré del Toro, 53 ans, également lauréat du titre de meilleur réalisateur, sur la scène du Dolby Theatre. Espérant que ses films génèrent «l’empathie», il a appelé les jeunes cinéastes qui veulent «utiliser le genre fantastique pour raconter ce qui se passe dans le monde aujourd’hui à mettre un grand coup de pied dans la porte». La nouvelle a été fêtée au son des mariachis dans la ville natale de Del Toro, Guadalajara, dans l’ouest du Mexique, où une petite foule a soulevé une réplique géante de la statuette dorée en chantant: «Ole, ole ole ole! Toro, Toro!» Belle soirée pour le Mexique: «Coco» de Pixar, un hommage à la Fête des morts, a remporté les Oscars du meilleur film d’animation et de la meilleure chanson. C’est la 6ème victoire d’affilée pour le groupe Disney. Chez les comédiens, Allison Janney a reçu le prix du meilleur second rôle féminin pour avoir joué la mère abusive de la patineuse Tonya Harding dans «Moi, Tonya», et l’anglais Gary Oldman celui du meilleur acteur pour son interprétation fiévreuse de Winston Churchill dans «Les heures sombres». Lors d’un temps fort de la nuit, Frances McDormand a appelé toutes les artistes féminines dans la salle, actrices, compositrices, productrices, scénaristes, réalisatrices, à se lever. »Nous avons des histoires à raconter et des projets qui ont besoin de financement», a insisté la comédienne de 60 ans, oscarisée pour la seconde fois. Dans son discours introductif, le présentateur Jimmy Kimmel a ironisé sur la statue de l’Oscar, «qui garde ses mains là où on peut les voir, il ne dit rien d’insultant et n’a pas de pénis, (…), on a besoin de plus d’hommes comme ça» à Hollywood. Il a ajouté que le cinéma doit «montrer l’exemple» en matière de harcèlement et d’égalité hommes-femmes. Ces Oscars étaient les premiers depuis les révélations sur Harvey Weinstein, le producteur déchu accusé d’avoir harcelé ou agressé sexuellement une centaine de femmes dont des stars comme Gwyneth Paltrow et Salma Hayek. Aux côtés d’Ashley Judd, l’une des premières à avoir parlé publiquement contre Weinstein, et d’Annabella Sciorra qui accuse le producteur de l’avoir brutalement violée, Salma Hayek a présenté une vidéo contre les discriminations à l’encontre des femmes, des minorités sexuelles et ethniques.  La cérémonie a été marquée de messages contre la politique anti-immigration du président américain Donald Trump. Jimmy Kimmel a notamment évoqué la «superbe Lupita Nyong’o», «née au Mexique et élevée au Kenya. Et voilà l’avalanche de tweets qui va commencer depuis les toilettes présidentielles». La comédienne a quant à elle déclaré, allusion aux jeunes sans-papiers surnommés les «dreamers»: «les rêves sont la fondation d’Hollywood et de l’Amérique». Côté diversité, le palmarès a récompensé un cinéaste noir, Jordan Peele, pour le scénario de son film d’horreur «Get Out», qui critique le racisme bien-pensant. L’Oscar du meilleur film en langue étrangère est allé au chilien «Une femme fantastique» de Sebastian Lelio, porté par une actrice transgenre, Daniela Vega.