Jean-Marc Dumontet, le roi des théâtres parisiens

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Sa carrière fulgurante rappelle celle de son ami Emmanuel Macron : destiné à devenir notaire de province, Jean-Marc Dumontet règne sur un petit empire de théâtres parisiens, huit ans seulement après son arrivée dans la capitale. Le parallèle entre les deux hommes est frappant : l’un autodidacte de la politique qui a voulu dépasser le clivage droite-gauche, l’autre autodidacte de la production qui veut rapprocher théâtre privé et théâtre public et jongle entre spectacles humoristiques et pièces plus sérieuses. «Les artistes comme les politiques doivent faire preuve de courage», affirme M. Dumontet, interviewé au Comedia qu’il a racheté en janvier, portant à six le nombre de théâtres dont il est propriétaire. «Ils doivent oser des prises de position avant-gardistes», ajoute ce grand homme élégant à la barbiche poivre sel. Depuis qu’il a clairement annoncé il y a un an son soutien au candidat d’En Marche!, son enthousiasme pour le président de la République n’a pas diminué. «C’est quelqu’un qui est sorti des débats stériles», souligne M. Dumontet qui a participé à de nombreux meetings et prêté Bobino pour un rassemblement.Intéressé par «le» politique, Jean-Marc Dumontet a lancé en février «Paroles citoyennes» (jusqu’au 20 mars), un festival de pièces à caractère socio-politique qui invitent à la réflexion à l’immigration, à la violence sexuelle ou encore le jihadisme. Celui que certains pressentent comme un possible ministre de la Culture dans l’avenir dit admirer «le courage de Macron et sa manière d’aller marcher sur les plates-bandes des autres, d’être transversal». Transversal, Dumontet l’est aussi. Il y a 20 ans, ce Bordelais issu d’une famille bourgeoise de notaires et père de quatre enfants ne se voyait certainement comme le premier producteur de spectacles indépendant à Paris et en France, avec 750.000 billets vendus dans la capitale en 2016. Il fait Sciences-Po Bordeaux, une année à l’école notariale, avant de créer des agences de communication, de gérer un journal économique à Bordeaux, deux restaurants et même une société de livraison de pizzas. «J’ai la chance d’avoir deux cordes, l’ambition artistique et la formation dans le monde de l’entreprise», précise le producteur, qui a également relancé la cérémonie des Molières en 2014 alors que personne n’en voulait. Un double don qui lui permet d’exploiter des théâtres qu’il a tous rentabilisés — le Point-Virgule, Bobino, le Théâtre Antoine, le Grand Point Virule, le Comedia et le Sentier des Halles–, mais aussi d’être un manager d’artistes, notamment d’humoristes reconnus comme Nicolas Canteloup, François-Xavier Demaison et Alex Lutz. «Je suis le producteur le plus interventionniste de Paris», sourit-il. Il n’hésite pas en effet à rajouter une scène, à supprimer un sketch, à choisir un générique, au risque de fâcher des artistes, à commander de nouvelles loges en 48 heures ou à ordonner le nettoyage d’un lustre gigantesque.Son entourage et ses partenaires le qualifient de «brillant», «fonceur» ou encore «un monstre d’énergie». Lui se dit «en perpétuelle recherche d’aventure». «Quand vous êtes patron, vous êtes responsable de tout», assure le producteur qui dit voir «200 spectacles par an». Il pense à la rentabilité, mais ne fonctionne pas en rentier. Pour lui, faire de l’argent et du théâtre sérieux ne sont pas nécessairement antagonistes. «Si j’ai des spectacles qui me rapportent de l’argent et à côté je peux lancer un festival très ambitieux, c’est formidable», assure-t-il. «L’enjeu du théâtre privé, c’est de sortir de la routine, de chercher de nouvelles formes d’écriture. C’est en bousculant les choses qu’on réussit», assure le manager.