L’aventure d’Amazon, une petite librairie en ligne devenue un géant à 1.000 milliards de dollars

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L’aventure d’Amazon, une petite librairie en ligne devenue en un peu plus de 20 ans un mastodonte du commerce valant 1.000 milliards de dollars en Bourse, reflète l’obsession de son créateur pour une vision à long terme. Jeff Bezos a fondé son entreprise en 1994, avec de l’argent emprunté à ses parents. Il est depuis devenu l’homme le plus riche sur Terre, avec 166 milliards de dollars au compteur mardi. Et Amazon, qui s’est peu à peu étendu dans le monde entier, emploie désormais plus de 575.000 personnes. Entre temps, la société a déployé ses tentacules dans le commerce électronique, l’informatique dématérialisée («cloud») ou les assistants vocaux intelligents avec Alexa. Et les milieux économiques frémissent à chaque fois que l’entreprise investit un nouveau créneau, qu’elle lance son propre service de vidéos en ligne ou rachète la chaîne de supermarchés bio Whole Foods. Fort de ses succès, Amazon a rejoint mardi Apple dans le club des sociétés dépassant les 1.000 milliards de dollars de capitalisation boursière, quand son action a atteint en cours de séance à Wall Street 2.050,27 dollars. Si ce seuil est surtout symbolique, il illustre la rapide et insolente réussite de l’entreprise. Le titre a finalement clôturé un peu en-dessous, à 2.039,51 dollars, ce qui correspond tout de même à 995 millions de dollars de valorisation. «C’est amusant de comparer Apple et Amazon, car ce sont 2 entreprises très différentes», remarque Rob Enderle, un spécialiste du secteur technologique. «Apple repose en gros sur un seul produit», l’iPhone, «Amazon est tout l’inverse». Comme Apple, Amazon fait ses débuts dans un garage sur la côte nord-ouest des Etats-Unis, d’abord sous le nom de «Cadabra». Installée dans la banlieue de Seattle, l’entreprise vend son 1er livre en ligne en 1995, à un ingénieur informatique. Le groupe bouscule peu à peu les habitudes de consommation en proposant aux internautes une palette de produits bien plus vaste que les allées d’un supermarché. Et en leur permettant de trouver facilement les prix les plus bas. Plusieurs économistes parlent d’ailleurs «d’effet Amazon» pour justifier en partie la faible inflation aux Etats-Unis. Amazon a longtemps perdu de l’argent, son patron préférant investir massivement dans de nouveaux entrepôts ou services malgré les critiques des analystes financiers et des investisseurs spéculatifs exigeant des bénéfices plus rapides. «Chaque cent qu’il gagnait, il le réinvestissait dans l’entreprise», rappelle Rob Enderle.

Le pari est devenu payant: le groupe a gagné 2,5 milliards de dollars au seul 2T 2018. Amazon compte aussi plus de 100 millions d’abonnés dans le monde à son service Prime, qui propose contre un forfait modeste la livraison gratuite, la vidéo en ligne, des rabais particuliers et une multitude de petits services. Cette offre est devenue un élément-clé du modèle économique d’Amazon puisqu’il permet de fidéliser ses clients et d’avoir accès à nombre de leurs données personnelles. Seule petite ombre au tableau: par rapport aux bénéfices que l’entreprise dégage, le prix de son action est beaucoup plus élevé que la moyenne du secteur technologique. Mais les investisseurs restent séduits par les performances de la société et par ses perspectives: sa valeur boursière a plus que doublé en un an. Selon le cabinet de recherche eMarketer, son c.a. devrait encore croître de 28% cette année pour atteindre 394 milliards de dollars, et représenter près de la moitié de toutes les ventes effectuées en ligne aux Etats-Unis. «Malgré sa taille et son ampleur, Amazon est jeune», souligne Neil Saunders, du cabinet GlobalData Retail. «Le groupe est peut-être mature dans le secteur des livres et des médias mais il commence à peine à s’installer dans des secteurs comme l’épicerie ou le mobilier», estime-t-il. Et nombre de pays restent à conquérir.