M. GUIDONI-DEREGNAUCOURT (ACCeS) : « Les chaînes thématiques payantes restent un laboratoire qui se préoccupe des nouveaux publics »

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Muriel GUIDONI-DEREGNAUCOURT, Déléguée générale de l’ACCeS

Les chaînes thématiques payantes ont investi 38,4 M€ dans la production aidée en 2017. Un investissement en baisse au fil des années. Dans le cadre d’un petit déjeuner organisé hier matin par l’ACCeS, média+ s’est entretenu avec Muriel GUIDONI-DEREGNAUCOURT, Déléguée générale de l’ACCeS.

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Les revenus des chaînes de télévision payantes sont globalement en baisse. Est-ce une fatalité ?

Muriel GUIDONI-DEREGNAUCOURT

Non, ce n’est pas une fatalité. En revanche, c’est une inquiétude et une tendance lourde qui doit être combattue, notamment par une modernisation du cadre réglementaire qui permettrait de dégager des marges de manœuvres financières supplémentaires pour ainsi continuer à investir à la fois dans les programmes, mais aussi dans la construction de notoriété et les nouveaux services qui sont extrêmement attendus.

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L’investissement des chaînes thématiques payantes dans la production est-il encore important ?

Muriel GUIDONI-DEREGNAUCOURT

L’investissement dans la production audiovisuelle est de 38,4 M€ en 2017 pour les chaînes thématiques payantes (hors CANAL+ mais comprenant les chaînes thématiques du Groupe CANAL). C’est un investissement plus important que celui des chaînes de la TNT gratuite (32,8 M€/an). Si on considère que les ressources des chaînes payantes baissent, les diffuseurs se battent pour continuer à investir afin de marquer leur différence par de l’inédit, des créations originales et des programmes récents. Alors même que les ressources de la TNT gratuite progressent, leurs investissements baissent. Quant aux chaînes payantes, elles sont jugées sur la satisfaction des abonnés.

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Les chaînes thématiques payantes sont-elles encore considérées comme le laboratoire qui se préoccupe des nouveaux publics ?

Muriel GUIDONI-DEREGNAUCOURT

Plus que jamais ! Elles peuvent tester de nouvelles écritures, avoir des angles plus pointus ainsi que des traitements différents et singuliers. C’est un espace de liberté en termes de formats et de programmation. Les chaînes thématiques peuvent à la fois s’aventurer sur des écritures nouvelles mais aussi créer des cycles et lancer des cases. Elles investissent 17,1 M€ dans le genre documentaire en 2017. Par la même occasion, les chaînes thématiques font travailler de jeunes réalisateurs et auteurs qui n’ont pas nécessairement la confiance des chaînes historiques.

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L’ACCeS alerte les pouvoirs publics sur la situation économique des chaînes thématiques payantes qui se dégrade. Que leur dites-vous ?

Muriel GUIDONI-DEREGNAUCOURT

Depuis 2007, les chaînes thématiques payantes ont investi plus de 440 M€ dans la production audiovisuelle aidée et près de 230 M€ dans le genre documentaire (selon les chiffres du CNC). Il est compliqué aujourd’hui de continuer à investir avec autant de boulets aux pieds, avec une réglementation qui date et qui est totalement inadaptée à l’économie des chaînes thématiques et aux nouveaux usages. Si on veut continuer à produire dans ce pays et faire rayonner nos programmes dans le monde entier, il faut impérativement alléger le cadre réglementaire des éditeurs non hertziens. Il faut agir sur la publicité et les obligations en pensant les choses avec des paliers de chiffres d’affaires afin que les petites chaînes puissent continuer à grandir. L’ACCeS le dit depuis de nombreuses années : une réforme est urgente. A force de la retarder, les investissements dans la création vont être impactés. C’est justement la dernière chose à laquelle nous souhaitions toucher. Si elle baisse aujourd’hui, c’est bien que toutes les économies aient été faites ailleurs.