M. HINTERMANN-AFFEJEE (CSA): « Il reste beaucoup à faire sur la représentation de la diversité à la TV »

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Mémona HINTERMANN-AFFEJEE, Membre du CSA en charge du groupe de travail Cohésion Sociale

Chaque année, le CSA fait réaliser un baromètre destiné à évaluer la perception de la diversité de la société française à la télévision. Les détails avec Mémona HINTERMANN-AFFEJEE, Membre du CSA en charge du groupe de travail Cohésion Sociale.

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Quelle est votre vision de la diversité à la télévision ? S’améliore-t-elle ?

Mémona HINTERMANN-AFFEJEE

Oui, c’est indéniable. Cela fait 5 ans que nous travaillons d’arrache-pied sur ce sujet. Un constat s’impose : les écrans de TV sont un peu moins pâles qu’il y a quelques années. Nous pensons avoir contribué à changer les regards pour avoir une autre fraternité au sein de la société française. Les chaînes de télévision ont réussi un faire un bon en avant. Si les personnes perçues comme «blanches» restent largement majoritaires à la télévision (81%), les résultats de la vague 2017 montrent toutefois une augmentation de la représentation des personnes perçues comme «non-blanches» sur les antennes (19% des personnes indexées contre 16% en 2015). Cette augmentation se fait dans les programmes d’information, mais elle est particulièrement marquée dans la fiction (23% vs 17% en 2015). C’est un changement qualitatif extrêmement important.

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Pour autant, il y a une surreprésentation des personnes vues comme «non-blanches» dans des rôles à connotation négative…

Mémona HINTERMANN-AFFEJEE

C’est le revers de la médaille. Parmi les personnes vues comme «non-blanches», elles sont très fortement représentées dans des activités marginales ou illégales.

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Où sont les efforts à accomplir ? Quels messages voulez-vous transmettre aux chaînes ?

Mémona HINTERMANN-AFFEJEE

Il faudrait que les chaînes de TV aient le courage d’agir sur plusieurs pans de notre société si multiple. Les visages de personnes handicapées sont très rarement montrés. Début novembre 2017, TF1 proposait «Mention particulière» avec un personnage trisomique. Une initiative remarquée, à confirmer. Cette production a permis de toucher un large public et c’est bien la preuve que c’est possible. Pour autant, il ne faut pas incriminer les chaînes en leur disant que c’est trop rare. Petit à petit, nous parviendrons à changer les regards. Ce n’est pas encore une politique des chaînes mais les résultats auxquels nous avons abouti en 2017 montrent que la France change de braquet sur le plan de la représentation de sa diversité. Comme on ne dispose pas de base juridique dans la loi de 1986 qui a été rafistolée et qui ne représente plus rien, c’est sur la base de l’influence du CSA que nous pouvons convaincre les chaînes de changer les regards.

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Peut-on franchement en arriver au quota de la représentation de la diversité?

Mémona HINTERMANN-AFFEJEE

Non, je ne pense pas. Aux Etats-Unis et en Allemagne, j’ai vu comment ce mouvement est lancé dans la société civile. L’attente est très forte. En France, le Président de la République, Emmanuel Macron a prononcé récemment un discours sur la responsabilité éthique des chaînes de l’audiovisuel. Il sait que le compte n’y est pas, aussi bien quantitativement que qualitativement. Je ne peux donc pas imaginer que ces entrepreneurs de l’audiovisuel privés ou publics n’aient pas entendu son message.