Plongée dans la «boîte de prod» des JO 2024

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Les Jeux de Paris-2024 ne sont que dans 6 ans mais dans un immeuble discret de Madrid, les équipes du bras audiovisuel du mouvement olympique planchent déjà sur sa production télé en mondovision. Plus de 5 milliards de téléspectateurs pour les derniers Jeux de Rio en 2016, plus de 6 milliards de dollars de droits télé pour ceux de Tokyo en 2020, la diffusion des Jeux est un «blockbuster» et une énorme machine à cash. Dont le cerveau est basé dans la capitale espagnole. Seul un logo surmonté des anneaux olympiques sur le portail prouve que l’on entre dans une dépendance du Comité international olympique (CIO). A l’intérieur, plus de 160 personnes de 35 nationalités différentes planchent sans arrêt sur la production audiovisuelle des JO à venir. «Préparer des Jeux est une mission permanente. Aujourd’hui, nous sommes évidemment très proches de la finalisation de nos plans pour Tokyo», explique Yiannis Exarchos, l’imposant patron grec de cette «boîte de prod» du mouvement olympique baptisée Olympic Broadcasting Services (OBS). «Mais nous avons déjà entamé une planification assez détaillée des Jeux d’hiver de Pékin (2022) et nous avons déjà commencé à discuter avec Paris (2024) et Los Angeles (2028)», ajoute-t-il. Sotiris Salamouris, directeur en charge de la technologie d’OBS, est justement dans la capitale chinoise en cette fin novembre. «Nous avons besoin de mener un grand nombre de discussions avec le comité organisateur au sujet des infrastructures qu’ils vont devoir mettre à notre disposition. C’est un processus long», dit-il. «La priorité, c’est l’IBC», l’International Broadcast Centre, cerveau de la retransmission des Jeux où les chaînes du monde entier récupèrent le signal d’OBS, qui filme toutes les compétitions, pour retransmettre les épreuves dans leur pays. «Nous devons travailler très en amont avec le comité organisateur pour trouver le lieu, le sécuriser, fixer le calendrier, les travaux nécessaires…», ajoute-t-il. «C’est ce que nous commençons (à aborder) avec Paris», qui a décidé d’installer l’IBC au Bourget. Toute cette organisation reposait initialement sur les comités organisateurs qui en plus d’orchestrer les Jeux étaient en charge de la couverture audiovisuelle de l’événement le plus regardé de la planète avec la Coupe du monde de football. Mais «cela commençait à devenir un gros fardeau pour les comités organisateurs, les Jeux devenant plus gros et plus complexes», explique Yiannis Exarchos. Le CIO commence à en prendre conscience à Atlanta en 1996 et crée en 2001 OBS, qui réalise ses 1ers Jeux à Pekin en 2008. Car la machine JO est devenue énorme. «Nous employons durant les jeux 7.000 professionnels venant de 90 pays, nous avons 1.000 caméras et des centaines de milliers de kilomètres de câbles», qui vont notamment relier la piscine ou le stade olympique à l’IBC, énumère Yiannis Exarchos. Mais pourquoi le bras audiovisuel du CIO a été installé à Madrid ? «Cela ne vient pas du ciel, cela vient de (Manolo) Romero», plaisante Juan Antonio Samaranch Salisachs, fils de l’ancien patron du CIO Juan Antonio Samaranch. Espagnol et grand manitou de la couverture audiovisuelle des Jeux depuis Mexico en 1968, Romero a été propulsé patron d’OBS à sa création et a tenu à ce que la société soit basée à Madrid où il vivait. Les «événements sportifs majeurs restent le Graal» pour les diffuseurs et les droits audiovisuels des Jeux sont en constante augmentation. Ils voient leur croissance désormais aussi «soutenue (…) par les nouveaux acteurs du numérique sur le marché», souligne Exarchos. Une manne financière vitale pour le sport, selon lui, «90% étant dédié au soutien du mouvement olympique et au développement du sport», le reste servant au financement du CIO. «C’est une bouée de sauvetage», «la grande majorité des sports qui sont dans le programme olympique auraient du mal à survivre sans les revenus venant des droits» audiovisuels, assure-t-il.