Primés aux Oscars, Amazon et Netflix assoient leur légitimité dans le monde de la production cinématographique

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Les plateformes de vidéo en ligne Amazon et Neftlix ont été récompensées, pour la 1ère fois, aux Oscars, dimanche et assis ainsi un peu plus leur légitimité dans le monde de la production cinématographique.Bras artistique du géant de la vente en ligne, Amazon est reparti dimanche soir avec trois statuettes, deux pour le drame «Manchester by the Sea» (meilleur acteur et meilleur scénario) et une pour «Le Client», couronné meilleur film en langue étrangère. Quant à Netflix, il a reçu un Oscar pour «Les Casques blancs», primé dans la catégorie documentaire de format court. A la différence d’Amazon, qui avait seulement acheté les droits de distribution des deux longs métrages, Netflix a participé à la production du documentaire. Le PDG d’Amazon, Jeff Bezos, qui était présent à la cérémonie dimanche à Hollywood, a tweeté ses félicitations à l’acteur Casey Affleck et au réalisateur de «Manchester by the Sea», Kenneth Lonergan. Le directeur général de Netflix, Reed Hastings, a lui salué les fameux Casques blancs depuis le Mobile World Congress de Barcelone, la grand-messe des télécoms. Passés à la production de séries en 2013, Amazon et Netflix se sont résolument tournés vers le cinéma en 2015. Considérés jusque-là exclusivement comme des acteurs de second rang, qui achetaient les films après leur passage en salle, voire ailleurs en télévision, ils ont commencé à investir dans l’exclusivité des droits. A tel point qu’aujourd’hui, les 2 plateformes sont devenues les 1ers acquéreurs lors du festival américain du cinéma de Sundance. Après avoir fait un chèque de dix millions de dollars pour «Manchester» l’an dernier, Amazon en a ainsi déboursés 12 en janvier pour s’assurer les droits de la comédie romantique «The Big Sick». Netflix a lui payé 12,5 millions de dollars, selon la presse américaine, pour ceux de «Mississippi», film dramatique situé dans le sud des Etats-Unis. Avec un budget consacré au contenu de six milliards de dollars pour 2017, en hausse de 20% par rapport à l’an dernier, Netflix déborde progressivement de plus en plus du contenu dédié à la télévision vers le cinéma. L’industrie de la télévision avait déjà largement fêté le passage de Netflix à l’âge adulte, en lui attribuant, depuis 2013, 17 Emmy Awards, les trophées américains du genre, dans des catégories majeures. En 2015, Amazon a suivi, avec ses cinq premiers Emmys. Mais le milieu du cinéma n’avait lui, pas encore consacré leur existence artistique. C’est désormais chose faite. S’ils s’appuient tous deux sur une base de diffusion en ligne par abonnement, Amazon et Netflix diffèrent sensiblement dans leur modèle économique du cinéma. Le 1er a choisi de distribuer d’abord dans les salles, à l’instar de «Manchester by the Sea», avant de diffuser, dans un second temps, sur sa plateforme. Netflix, lui, voudrait proposer ses films en même temps en salle et en ligne, mais s’est heurté, à plusieurs reprises, aux distributeurs, qui craignent de voir leur modèle affaibli. Jusqu’ici, lorsqu’il a pu parvenir à ses fins, le groupe aux lettres rouges a dû se contenter d’une poignée de salles, ce qui ne constitue pas un vrai canal de distribution. Il a signé en octobre un partenariat, à ces conditions, avec la chaîne de cinémas haut de gamme iPic, qui ne compte qu’une petite centaine d’écrans aux Etats-Unis. Reed Hastings n’en démord pas, même si son approche en irrite plus d’un dans le monde du cinéma. «Les propriétaires de salles étranglent le cinéma», a-t-il lancé en octobre. «Il n’y a eu aucune innovation dans l’économie du cinéma ces cinquante dernières années». En choisissant cette ligne, le directeur général de Netflix se prive, pour l’instant, du succès qu’a connu Amazon avec «Manchester by the Sea», une production de peu de moyens qui a déjà rapporté plus de 46 millions de dollars aux box-office nord-américain.