Réforme du droit d’auteur: les 28 de l’UE avancent mais peinent à s’accorder

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Les 28 de l’UE avancent mais peinent à s’accorder sur la très attendue réforme du droit d’auteur, qui ambitionne de pousser les plateformes à mieux rémunérer éditeurs de presse et artistes pour leurs productions accessibles en ligne. Réunis vendredi à Bruxelles, les ambassadeurs des 28 pays de l’Union n’ont pas réussi à se mettre d’accord sur la proposition présentée le 14 septembre 2016 par la Commission européenne, et dont l’objectif principal est la modernisation du droit d’auteur – rendue nécessaire après la révolution numérique. Les discussions achoppent essentiellement sur 2 points. Premièrement, la mise en place d’un nouveau «droit voisin» pour les éditeurs de presse. Proposé par l’exécutif européen, il devrait permettre aux journaux, magazines, mais aussi aux agences de presse – qui s’estiment pillés de leurs contenus par les agrégateurs d’information comme Google News – de se faire rémunérer. L’arrivée d’internet a en effet mis à mal le modèle économique traditionnel de la presse, les éditeurs voyant s’effondrer leurs ventes papier et leurs recettes publicitaires. «L’idée d’un tel droit est désormais acceptée, même par les pays les plus réticents», a indiqué vendredi une source proche des négociations. «La question maintenant, c’est comment on le paramètre», a ajouté une autre source. La Bulgarie, qui assure la présidence semestrielle de l’UE jusqu’à la fin juin, et de ce fait pilote les négociations des 28 pays, a proposé de retenir le «critère d’originalité» du texte, plutôt que sa taille. En clair, un texte simplement factuel – tel que par exemple «3.000 morts dans un tremblement de terre» – ne tomberait pas sous le coup du droit voisin. Mais un nombre non négligeable d’Etats membres a refusé un tel critère, arguant notamment, selon une source bruxelloise, que «les robots chargés de faire le tri ne seraient pas capables de déterminer quand un texte est original ou pas». «Il va falloir retravailler sur ce point», a résumé un diplomate après les discussions de vendredi, notant que sur le droit voisin, «il n’existe pas de clivage Est/Ouest ou Nord/Sud». «Chaque pays réagit plutôt en fonction de son système national et de son expérience des plateformes», a-t-il observé. Seconde pomme de discorde parmi les 28: la proposition de la Commission d’obliger les plateformes de partage de vidéos, comme YouTube ou Dailymotion, à déployer des technologies permettant de détecter automatiquement des chansons ou des oeuvres audiovisuelles identifiées par les titulaires de droits et devant être soit autorisées, soit supprimées. L’objectif étant de renforcer la capacité des titulaires de droits à négocier et à être rémunérés pour l’exploitation en ligne de leurs contenus. Sur ce 2ème point, la discussion porte sur la définition des plateformes visées par le projet de la Commission. Selon des sources concordantes, s’opposent d’un côté les Nordiques, plus libéraux, associés à quelques pays de l’Est, qui veulent restreindre au maximum le nombre de plateformes visées, pour le confort du consommateur, et de l’autre ceux du Sud, qui s’inquiètent de la juste rémunération des auteurs. Les négociations s’annoncent donc encore difficiles, même si la Bulgarie est déterminée à accélérer les discussions sur cette législation qu’elle juge prioritaire avant la fin de sa présidence. Il lui faut réunir une majorité qualifiée (55% des Etats membres représentant au moins 65% de la population de l’UE) pour démarrer les négociations sur le sujet avec le Parlement européen. Or, du côté du 2ème co-législateur, les discussions piétinent également sur la proposition du rapporteur allemand Axel Voss, qui est favorable à la création d’un droit voisin pour les éditeurs et les agences de presse. Enfin, côté français, le député centriste Patrick Mignola a présenté au Parlement une proposition de loi instaurant un droit voisin pour les éditeurs et les agences de presse. Elle sera débattue le 17 mai.