Sylvie Pierre-Brossolette (CSA) : « Entre 2016 et 2017, les expertes à la radio sont passées de 29 à 37%, soit +8 points en un an ! « 

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Sylvie Pierre-Brossolette, Conseillère responsable droits des femmes au CSA

La part des femmes dans le milieu audiovisuel est un sujet de longue date et toujours d’actualité. Pour évoquer ce sujet, média+ a rencontré Sylvie Pierre-Brossolette, Conseillère responsable droits des femmes au CSA.

MEDIA +

Aujourd’hui, quelle est la proportion de femmes dans les programmes audiovisuels ?

SYLVIE PIERRE-BROSSOLETTE

Nos dernières statistiques sont celles de l’année 2017. La proportion globale de femmes à la télévision et la radio se montait à 40%, avec une avance de la télévision sur la radio (42% contre 38%). Si l’on considère comme le plus symbolique le nombre de femmes expertes à l’antenne, il faut noter qu’il est de 35% (33% pour la télévision, 38% pour la radio). Leur nombre est bien supérieur dans le secteur public que sur les chaînes généralistes privées (41% contre 27%). Des chiffres en progrès, même si on peut encore regretter qu’ils ne soient pas plus élevés.

MEDIA +

Quelle en est l’évolution ?

SYLVIE PIERRE-BROSSOLETTE

La progression est nette depuis quelques années. Les premières statistiques, dont nous avons disposé avant l’entrée en vigueur de la loi du 4 août 2014 confiant au CSA le soin de veiller à la représentation des femmes dans les médias, situaient le taux de femmes expertes entre 13% et 20%. Le chemin parcouru est donc considérable. Surtout en radio, où les chiffres étaient les plus bas. Entre 2016 et 2017, les expertes à la radio sont passées de 29 à 37%, soit +8 points en un an ! On peut déplorer, en revanche, que le taux global de femmes présentes sur les chaînes de télévision demeure plus bas que la moyenne aux heures de grande écoute (18 h – 20 h) : 29% de femmes seulement sont présentes dans cette tranche horaire contre 42% en moyenne à la télévision.

MEDIA +

Y-a-il encore aujourd’hui des remarques ou des propos sexistes dans certains programmes ? Quelles sont les sanctions ?

SYLVIE PIERRE-BROSSOLETTE

Des propos ou des remarques sexistes peuvent encore survenir dans des programmes. Nous sommes généralement saisis au CSA sur ces cas. Depuis le vote de la loi de 2014, nous sommes intervenus 22 fois avec notre gradation habituelle (lettre, mise en garde, mise en demeure, procédure de sanction). Deux sanctions à incidence financière forte ont été prononcées. Elles ont été contestées devant le Conseil d’Etat. L’une d’elles, concernant NRJ12, vient d’être validée par le juge administratif. L’autre, concernant C8, l’avait été le 18 juin dernier. La tonalité des échanges dans «Touche pas à mon poste» s’est nettement améliorée depuis notre intervention.

MEDIA +

Que peut faire le CSA pour une juste égalité ? Et les autres acteurs de l’audiovisuel ?

SYLVIE PIERRE-BROSSOLETTE

L’action du CSA depuis cinq ans a contribué à une large prise de conscience. La loi nous y a aidé. Elle prévoit non seulement que le Conseil supérieur de l’audiovisuel puisse sanctionner les médias qui porteraient atteinte à l’image des femmes, mais que télévisions et radios rendent publics chaque année leurs statistiques concernant la présence des femmes sur leurs antennes. Cela crée un effet d’émulation. Personne n’a envie d’être bon dernier. Chaque responsable de média a désormais à cœur de progresser dans ce domaine.

MEDIA +

Des actions, notamment par TF1, sont mises en place pour mettre en avant cette différence. Ces actions aident-elles selon vous ?

SYLVIE PIERRE-BROSSOLETTE

TF1 s’est rendu compte qu’elle avait beaucoup de retard en ce qui concerne la présence des femmes, notamment expertes, dans ses émissions. Depuis deux ans, elle tente de mobiliser ses équipes pour redresser la situation. En 2017, le taux d’expertes est passé à 25%, +5 points en un an. C’est encore insuffisant, mais cela avance assurément. Nous avançons également dans un autre domaine, celui de la publicité. Notre étude mettait en lumière de graves stéréotypes : les experts, par exemple, sont des hommes dans 82% des cas. Sur la base de ce constat, nous avons réuni les acteurs du secteur et signé une Charte prévoyant de faire diminuer les stéréotypes chaque année. Enfin, nous allons nous attaquer au sujet difficile des émissions de téléréalité. Une concertation avec les chaînes est en train d’être menée pour aboutir à un engagement clair et motivé sur les limites à ne pas franchir en matière d’images des femmes…et des hommes.