Télécoms/ Huawei: sécurité ou rapidité, la problématique à laquelle fait face l’Europe

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Déployer rapidement la 5G, en s’appuyant notamment sur les équipements du numéro un mondial du secteur, Huawei, ou privilégier la sécurité nationale face aux menaces que pourraient représenter l’utilisation d’équipements chinois, telle est aujourd’hui la problématique à laquelle font face les principaux pays occidentaux.

L’Europe ne veut surtout pas se laisser distancer par les Etats-Unis et les principaux Etats asiatiques dans le déploiement de la nouvelle et puissante technologie de télécommunications mobiles, censée rendre les connexions quasiment instantanées et accroître la capacité de transmission des données. Toutefois, les craintes sur la sécurité du réseau se font de plus en plus insistantes, notamment du fait des lois chinoises, qui obligent les groupes dont le siège social est en Chine à apporter une aide technique aux services de renseignement. Dans la foulée des Etats-Unis, plusieurs pays d’Asie et d’Océanie ont ainsi choisi de se priver de Huawei, rejoints depuis mercredi par la République Tchèque, une première en Europe. Mais pour les opérateurs, se priver de Huawei fait courir le risque de se laisser distancer dans la course à la 5G. Nombreux sont d’ailleurs ceux qui mènent actuellement des tests avec le Chinois, à l’image de Bouygues Telecom ou SFR dans plusieurs villes françaises. «Huawei est aujourd’hui plus cher que ses concurrents mais c’est également beaucoup mieux, ils ont vraiment pris de l’avance dans la qualité des équipements de réseau par rapport à leurs concurrents européens», rappelait ainsi récemment un opérateur européen. Selon une majorité d’experts, Huawei dispose entre six mois et un an d’avance en terme de qualité d’équipements 5G par rapport à son concurrent suédois Ericsson.

L’actuel numéro deux parmi les équipementiers, le Finlandais Nokia, semble en retrait. «Beaucoup veulent éviter les Chinois mais ce sont actuellement les plus avancés en la matière. Huawei est passé en quelques années du statut «lowcost» à celui de leader sur la 5G», confirme ainsi Victor Marçais, spécialiste des télécoms et médias pour Roland Berger. De sources concordantes, Huawei aurait même aidé Nokia en recherche et développement afin d’éviter de se retrouver seul face à Ericsson sur la 5G.

Interrogé sur le sujet, le groupe chinois, installé à Shenzhen (sud), se contente de reconnaître des «partenariats de long terme» avec plusieurs concurrents, «tant en terme de chaîne de production, standardisation et brevets. Nous avons toujours défendu le principe de l’innovation ouverte et de la collaboration pour faciliter le développement de l’industrie télécoms». Si Huawei a déjà réussi à faire la différence sur la 4G, le groupe de Shenzhen a mis les bouchées doubles sur la 5G. Chaque année, l’équipementier chinois dépense en effet de 10 à 15% de son chiffre d’affaires en recherche et développement, ce qui représentait 13,8 milliards de dollars en 2017 et plus de 15 milliards l’année écoulée. Une stratégie payante: en 2017, Huawei était déjà de loin numéro un mondial sur le marché des équipements de réseaux télécoms, avec 22% de part de marché, selon IHS Markit, loin devant Nokia (13%) et Ericsson (11%). Un écart qui pourrait encore s’accentuer, sans les perturbations géopolitiques actuelles.