Le scandale des postiers britanniques poursuivis à tort remis à la Une par une série télévisée

Le scandale des postiers britanniques  poursuivis à tort remis à la Une par une série télévisée
Former subpostmasters celebrate outside the Royal Courts of Justice in London, on April 23, 2021, following a court ruling clearing subpostmasters of convictions for theft and false accounting. - Dozens of former subpostmasters, who were convicted of theft, fraud and false accounting because of the Post Office's defective Horizon accounting system, have finally had their names cleared by the Court of Appeal. (Photo by Tolga Akmen / AFP)

Remis à la Une par une série télévisée, le scandale des postiers poursuivis à tort, l’une des pires erreurs judiciaires de l’histoire moderne du Royaume-Uni, suscite la colère grandissante du public qui demande des comptes à la justice et au gouvernement. Entre 1999 et 2015, quelque 700 responsables d’agences du Post Office – entreprise publique qui gère les bureaux de poste britanniques – ont été poursuivis pour vol ou falsification de compatibilité à cause d’un logiciel qui s’est avéré défectueux. Les dirigeants du service postal ont refusé de creuser les potentiels problèmes de ce système baptisé Horizon, et ont forcé des centaines de postiers à rembourser ces manques à gagner inexpliqués, ces derniers se criblant de dettes, perdant leur emploi ou leur maison. Certains ont été emprisonnés pour vol, et 4 employés se sont suicidés. La semaine dernière, la diffusion de la série «Mr Bates vs The Post Office» sur la chaîne britannique ITV a remis le scandale au coeur du débat et généré une vague de sympathie pour ses victimes. Ce programme raconte l’histoire d’Alan Bates, joué par l’acteur Toby Jones, qui a poursuivi le Post Office au nom de 555 employés en 2017 pour faire reconnaître leur innocence. Depuis, plus d’un million de personnes ont signé une pétition pour réclamer que l’ancienne directrice de l’entreprise, Paula Vennels, perde une décoration honorifique remise par la reine Elizabeth II. Le Premier ministre Rishi Sunak a lui aussi réagi lundi, qualifiant le scandale «d’effroyable erreur judiciaire» et assurant que le gouvernement fera «tout ce qui est en son pouvoir» pour obtenir des compensations pour ceux qui n’en ont pas encore bénéficié. Le Post Office a commencé à installer ce logiciel comptable Horizon du géant japonais Fujitsu à partir de la fin des années 1990, mais des failles dans sa programmation ont entraîné des déficits dans les comptes des succursales. Comme Jo Hamilton, postière évoquée par la série et accusée à tort d’avoir volé 36.000 livres (42.000 euros), certains employés ont préféré plaider coupable plutôt que d’être envoyés en prison. D’autres n’ont pas pu, ou pas voulu payer: 700 responsables d’agence du Post Office ont ainsi été poursuivis, et 236 ont été emprisonnés. Après l’action intentée par Alan Bates et 5 autres personnes, la Haute Cour britannique a reconnu en décembre 2019 un «risque important» que le système Horizon soit la cause de ces déficits dans les comptes des succursales postales. Un juge a également condamné le Post Office pour «obstination institutionnelle» face à son refus d’enquêter correctement sur la source du problème. Seules 93 condamnations ont été annulées dans cette affaire et 21 millions de livres sterling (24 millions d’euros) ont été versés en compensation aux employés concernés. Mais pour Kevan Jones, un député membre du comité chargé d’accorder des indemnisations aux victimes du scandale, il sera difficile d’obtenir de nouvelles annulations, car «la plupart des personnes ne se manifestent pas», et préfèrent se tenir à l’écart des tribunaux après ce traumatisme. Jess Kaur, dont l’histoire est aussi racontée dans la série, a dit ne pas parvenir à oublier la honte d’avoir été présentée devant un juge pour un crime qu’elle n’avait pas commis. En septembre, le gouvernement a annoncé que les responsables d’agences condamnés à tort pourraient recevoir chacun 600.000 livres (près de 700.000 euros). Face à la colère du public, la police de Londres a annoncé vendredi qu’elle enquêtait «sur de potentiels délits de fraude découlant de ces poursuites», en plus des investigations lancées en 2020 sur de possibles faits de parjure et de détournement du cours de la justice à l’époque. Les victimes espèrent que ces investigations permettront d’établir la responsabilité des dirigeants, sachant que de sérieux doutes avaient déjà été soulevés au sujet du logiciel Horizon.

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