Kenya: un logiciel espion installé sur les téléphones de cinéastes arrêtés en mai, selon le Comité pour la protection des journalistes

Kenya: un logiciel espion installé sur les téléphones de cinéastes arrêtés en mai, selon le Comité pour la protection des journalistes

Le Comité pour la protection des journalistes (CPJ) s’est dit mercredi «vivement préoccupé» par l’installation, selon lui, d’un logiciel espion sur les téléphones de deux cinéastes kényans à la suite de leur arrestation en mai dans le pays d’Afrique de l’Est.

Accusés d’avoir propagé de «fausses informations» après la diffusion d’un documentaire de la BBC sur la répression par la police des manifestations antigouvernementales de juin 2024, quatre cinéastes indépendants – Nicholas Wambugu Gichuki, Brian Adagala, Mark Karubiu et Chris Wamae – avaient été arrêtés à Nairobi puis libérés sous caution.

La police les a accusés d’avoir participé à la production de «Blood Parliament» (Le Parlement de Sang, vu plus de 7 millions de fois sur Youtube, NDLR), qui impliquait les forces de sécurité kényanes dans les meurtres de manifestants l’année dernière.

La BBC avait cependant précisé qu’aucun des quatre réalisateurs arrêtés n’avait participé au film.

Lors de leur interpellation, les enquêteurs ont saisi plusieurs appareils électroniques qui n’ont été restitués que le 10 juillet, a précisé au CPJ l’avocat des cinéastes, Ian Mutiso. Une analyse menée par un organisme de surveillance d’Internet à l’Université de Toronto, Citizen Lab, a révélé que le logiciel espion FlexiSPY, disponible dans le commerce, avait été installé sur deux téléphones autour du 21 mai, selon le chercheur John Scott-Railtona, cité par le CPJ dans un communiqué.

Un tel logiciel «donnerait aux opérateurs un accès secret et discret à toutes sortes d’informations privées sur leurs activités et leur travail journalistique», a précisé M.Scott-Railtona.

Des documents du Citizen Lab diffusés à la presse indiquent qu’il s’agit des téléphones de MM. Wambugu et Adagala. «Les autorités doivent s’expliquer sans délai», s’est indignée la directrice des programmes du CPJ, Angela Quintal, en dénonçant une manoeuvre «scandaleuse».

Les conclusions de Citizen Lab ont été soumises au tribunal, a précisé M. Mutiso au CPJ, en soulignant que les quatre cinéastes avaient comparu à plusieurs reprises, sans inculpation, les autorités demandant plus de temps pour les enquêtes. Contactée, la police kényane et le ministère de l’Intérieur n’ont pas réagi dans l’immédiat.

En juin-juillet 2024, au moins 60 personnes ont été tuées lors de manifestations contre un projet de nouvelles taxes voulues par le gouvernement du président William Ruto.

En 2025, 65 personnes ont été tuées lors de quatre journées de manifestations dans le pays, selon la police des polices kényanes, qui a dénoncé «un recours disproportionné à la force».

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