M.Vergne (DMLSTV) : « Les réactions du public sont précieuses, mais elles ne doivent pas dicter la production »

M.Vergne (DMLSTV) : « Les réactions du public sont précieuses, mais elles ne doivent pas dicter la production »

Le 18 octobre, «Star Academy» revient sur TF1 ! Produit par Endemol France avec la collaboration éditoriale et artistique de DMLS TV, le show se réinvente. Son producteur, Mathieu Vergne dévoile les coulisses artistiques et techniques de cette édition. 

Le plateau 217 a été totalement repensé avec un nouvel écran, un rideau et même un tapis roulant. Êtes-vous dans une logique de théâtralisation ?

Le public attend de la «Star Academy» un grand spectacle du samedi soir. Cela fait partie de son ADN : proposer un show fort, visuellement impressionnant. Mais il ne faut jamais oublier que cette magie repose sur des élèves qui, pour la plupart, n’ont encore rien vécu de tel. Ils passent du salon familial à une scène immense, au milieu d’un dispositif monumental. C’est cet écart qui crée la fascination. On cherche évidemment à se renouveler, mais pas à dépenser pour dépenser. Chaque innovation doit servir une intention artistique. Quand on ajoute un rideau, par exemple, ce n’est pas un gadget : c’est un symbole. Le rideau, c’est le code du théâtre, l’excitation de se demander ce qu’il y a derrière. Il apporte une dimension plus théâtrale, plus organique, qui complète bien nos décors et nos univers immersifs à l’écran. Le tapis roulant, lui, est un outil de mise en scène. Il simule la marche d’un artiste dans un décor en 3D qui évolue en même temps que lui. L’idée est d’exploiter les technologies au service d’une émotion plus immersive. Nous avons aujourd’hui un plateau modulable, capable d’offrir 15 univers visuels totalement différents par Prime. Et, à l’inverse, il nous permet aussi des moments de pure intimité, rideau fermé, sans effets ni artifices. C’est cette souplesse qui nous intéresse : passer d’un show grandiose à une scène épurée centrée sur le visage, la voix, l’émotion.

Vous introduisez aussi de nouvelles mécaniques : face-à-faceexercice impossible, ouverture du Prime par le numéro 1 du Top 3… Jusqu’où peut-on “gamifier” sans trahir la promesse d’école et de cohésion ?

Nous avons observé que les téléspectateurs aiment avoir des repères. Les Primes durent près de 3 heures, donc installer des rendez-vous récurrents donne un rythme et une lisibilité. C’est rassurant pour le public et stimulant pour les élèves. Mais il ne s’agit pas de transformer «Star Academy» en jeu télé. Chaque mécanique a un sens pédagogique. Le numéro chanté-dansé, par exemple, n’est pas qu’un défi : c’est un exercice complet, une extension de la formation. L’«autoportrait» hebdomadaire, où les élèves se racontent en musique, prolonge un principe déjà existant. Tout cela reste cohérent avec l’enseignement artistique. En somme, nous structurons davantage le prime sans dénaturer son essence. C’est toujours une école de musique et de scène avant tout.

Vous évoquez souvent le public présent au 217. Les Primes affichent complet. N’avez-vous jamais songé à agrandir la jauge, ajouter des gradins ?

Malheureusement, non. Nous sommes limités par la taille du plateau et les contraintes techniques. Nous accueillons déjà environ un millier de spectateurs, ce qui est considérable au regard de la scène, de l’orchestre, des caméras et de la machinerie.

Acceptez-vous parfois de laisser une prestation imparfaite à l’antenne si elle raconte un vrai apprentissage ?

C’est une question que nous nous posons à chaque saison. On a toujours ce dilemme : trop parfait, et on perd l’authenticité ; trop brut, et on se met en dessous du niveau attendu pour un Prime TF1. La vérité se situe entre les deux. Nous mettons les élèves dans les meilleures conditions possibles : bons titres, bons arrangements, bonne mise en scène. Et ensuite, on laisse la vie faire son œuvre. Les imperfections viennent naturellement, et c’est tant mieux. Ce sont elles qui rappellent que ce sont des élèves en formation, pas des artistes confirmés.

L’interactivité progresse : Funbox, votes, réactions sur TF1+… Quelle place accordez-vous à la perception du public et aux réseaux sociaux dans votre façon de construire les Primes ?

Disons que c’est le même métier qu’il y a 20 ans, mais dans un contexte élargi. Avant, les retours venaient de nos proches ou des gens croisés dans la rue. Aujourd’hui, cette “rue” s’appelle X, TikTok, Instagram… On écoute, mais on trie. Les réactions du public sont précieuses, mais elles ne doivent pas dicter la production. TF1 réalise d’ailleurs des études post-Prime avec des panels, ce qui est plus constructif qu’un flux de commentaires. On retient ce qui est utile, on écarte ce qui relève du bruit.

Vous évoquez souvent la notion de protection des élèves…

C’est un sujet essentiel. Nous renforçons nos protocoles chaque année. Les élèves, mais aussi leurs familles, sont sensibilisés aux risques liés à l’exposition médiatique et aux réseaux. On les prépare à gérer le “pendant” et surtout “l’après”. «Star Academy» est un programme de lumière, mais cette lumière peut être violente. C’est notre responsabilité de les accompagner et de les protéger.

Charlotte Cardin sera marraine, Ed Sheeran parrain. Comment se structurent ces collaborations ?

Aucun deal financier. Ce sont des collaborations d’envie, de confiance. «Star Academy» apporte de la visibilité et un lien sincère avec le public ; les artistes, eux, apportent leur expérience et leur inspiration aux élèves. C’est un échange gagnant-gagnant. Pour les élèves, être coaché par Ed Sheeran ou Charlotte Cardin, c’est énorme. Cela fait partie de leur apprentissage : se confronter à l’excellence, apprendre auprès de figures contemporaines, dans une logique de transmission.

Vous parliez de “grosses sorties” à venir. Peut-on en dire plus ?

Nous préparons des séquences extérieures qui auront toujours un sens pédagogique ou artistique. L’idée, c’est que les élèves ne soient pas de simples spectateurs, mais des acteurs de l’expérience. Ils devront apporter quelque chose aux artistes qu’ils rencontrent ou aux événements auxquels ils participent.

Vous avez introduit une «carte blanche» dans le casting 2025. En quoi cette nouveauté a-t-elle modifié votre regard et votre perception des candidats ?

Sélectionner des élèves n’est jamais simple. Nous les faisons chanter, discuter, mais nous voulions aller plus loin dans leur univers personnel. On leur a donc demandé de se présenter librement pendant une minute, sans chanter. Certains ont fait des montages vidéo, d’autres des performances, des poèmes, des mini-scènes. Cette génération est très créative, très à l’aise avec les outils numériques. Cela nous a permis de mesurer leur personnalité, leur humour, leur regard artistique. Et cela nous a inspirés pour la manière dont nous allons les présenter dans le kick-off. Cette année, certains portraits seront tournés chez eux, d’autres prendront la forme de ces cartes blanches directement sur le plateau. C’est une façon de montrer, dès le départ, leur singularité.

Les artistes invités sont-ils de plus en plus impliqués dans la mise en scène ?

Certains talents s’impliquent beaucoup dans la scénographie ou la chorégraphie. D’autres nous laissent carte blanche. Ce qu’on veut, c’est que l’élève soit acteur du tableau, pas figurant. S’il y a un décor, un costume, une mise en scène, on les travaille ensemble pour que la star et l’élève soient dans le même univers, avec une vraie cohérence visuelle et émotionnelle. C’est un peu l’esprit “Enfoirés” : partage, transmission, énergie commune.

Quelle est, pour vous, la signature d’un Prime réussi, au-delà des audiences ?

L’émotion. Si à la fin de la soirée, on a ri, frissonné, été surpris ou ému aux larmes, alors c’est réussi. Il faut qu’il se soit passé quelque chose de vivant.

Des projets pour DMLS TV ?

Oui, nous avons plusieurs productions en cours. Une fiction, «Marie-Line, incognito» en tournage pour TF1. Nous développons également «Quel est l’âge de votre cerveau ?» pour M6, un jeu grand public autour des capacités cognitives. Et d’autres formats sont en développement, dont nous parlerons bientôt.

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