Lancé il y a un an lors du Sunny Side of the Doc, le collectif «Nous, réalisatrices de documentaires» signe un bilan positif avec 400 membres. L’occasion pour media+ d’évoquer les actions du collectif avec Karine DUSFOUR et Virginie LINHART, initiatrices de Nous, réalisatrices de documentaires.
media+ Un an après sa création, que représente le collectif «Nous, réalisatrices de documentaires» ?
Karine DUSFOUR Nous sommes très reconnaissantes au Sunny Side of the Doc de nous avoir accueillies pour lancer ce collectif en juin 2024. Un an après, le collectif regroupe 400 réalisatrices de documentaires, alors que nous étions 260 au départ. Cela témoigne d’un grand besoin des réalisatrices d’échanger entre elles et de s’entraider. Cela permet aussi de se rendre compte que nous ne sommes pas seules à vivre certaines pratiques que nous dénonçons. Cela nous prend du temps, certes, mais ce n’est que du positif. La Scam nous aide beaucoup.
media+ Quelle est la mission du collectif «Nous, réalisatrices de documentaires» ?
Virginie LINHART Le collectif a été créé avec l’ambition de porter les enjeux de parité, d’égalité des chances et d’accès aux mêmes budgets, sujets, cases et horaires que nos collègues réalisateurs, ou encore prévenir le sexisme et les violences sexuelles dans le milieu du documentaire. Nous dénonçons un procès en illégitimité que nous subissons. Certains producteurs doutent de notre capacité à pouvoir diriger de grosses équipes. De plus, nous sommes cantonnés dans des sujets que les hommes ne veulent pas traiter, comme la santé ou la culture. Nous demandons aussi au CNC d’étendre le bonus parité, mis en place dans la fiction, au genre documentaire.
media+ Un an après, constatez-vous certaines évolutions ?
Karine DUSFOUR Nous sommes très heureuses car nous avons été reçues et écoutées par l’Arcom, le CNC, France Télévisions, Arte… Et tout le monde a conscience du problème. Personne ne peut le nier d’ailleurs, les chiffres le démontrent ! Lors du Sunny Side of the Doc 2025, France Télévisions a lancé un appel aux producteurs pour proposer des dossiers portés par des réalisatrices. 72% des documentaires sont aujourd’hui réalisés par des hommes, c’est absurde.
media+ Comment le collectif participe-t-il à une meilleure visibilité des réalisatrices de documentaires ?
Virginie LINHART Nous avons créé un groupe WhatsApp pour rassembler ces réalisatrices. Qu’elles puissent échanger ensemble, se soutenir, et s’apporter des conseils. Nous avons aussi créé un compte Instagram où, tous les jours, nous postons un extrait d’un film documentaire réalisé par une femme. L’occasion de montrer la qualité de ces films et la diversité de ce qu’ils peuvent proposer. Le compte est très suivi, nous en sommes très fiers.
media+ Quelles sont les prochaines étapes pour le collectif «Nous, réalisatrices de documentaires» ?
Karine DUSFOUR Nous allons continuer à mettre la pression aux différents acteurs du secteur. Nous avons discuté avec l’Arcom pour une intervention commune au prochain Fipadoc. En 2026, nous allons organiser une grande soirée avec toutes les femmes primées dans des festivals pour montrer, là encore, que les réalisatrices savent faire du documentaire. Enfin, nous sommes désormais assez nombreuses pour pouvoir constituer des dossiers sur des producteurs qui ont des attitudes de harcèlement moral qui relèvent du pénal. Non pas pour les traîner en justice, mais pour alerter les autorités compétentes et protéger les réalisatrices.