Grand-messe de la chanson française, les Victoires de la musique veulent célébrer vendredi l’éclectisme, jusqu’aux JO de Paris, et fêter 40 ans d’une «belle histoire d’amour entre les artistes et le public», malgré d’impérissables critiques sur leur fonctionnement. Les paris semblent plus ouverts cette édition que la précédente, quand l’ouragan Zaho de Sagazan avait raflé 4 trophées sur 5 nominations. Parmi les 18 nommés, 10 sont présents dans 2 catégories ou plus. C’est le cas du duo électro Justice, sur un nuage depuis la sortie d’«Hyperdrama» et qui vient de glaner le 3ème Grammy Awards de sa carrière. La chanteuse pop Clara Luciani, les révélations Solann («Rome») et Aliocha Schneider («Ensemble»), font aussi partie des noms qui reviennent. Tout comme… Zaho de Sagazan, cette fois en lice pour l’artiste féminine de l’année et pour ses concerts, qui l’ont menée jusqu’à New York. Le record de nominations revient à Santa, citée à 4 reprises, notamment pour son 1er album «Recommence-moi». L’interprète de «Popcorn salé» a aussi brillé en clôture des Jeux paralympiques de Paris, en reprenant «Vivre pour le meilleur» de Johnny Hallyday. Les cérémonies d’ouverture et de clôture des Jeux, avec Thomas Jolly et Victor le Masne à la baguette, font d’ailleurs figure d’invitées surprises dans la catégorie «concert». Une autre originalité détonne du côté de la «création audiovisuelle», au milieu des clips: la série documentaire «DJ Mehdi: Made in France», succès critique et sur les écrans, retrace le parcours éclair du compositeur décédé accidentellement en 2011 à l’âge de 34 ans, qui a contribué à l’émergence des scènes rap et électro. Présidée par Alain Souchon, la cérémonie présentée par Léa Salamé et Cyril Féraud débutera à 21h10, à suivre sur France 2 et France Inter. Cette 40e édition célèbrera Sylvie Vartan, qui a fait ses adieux à la scène fin janvier à 80 ans, en lui décernant une Victoire d’honneur. La chanteuse n’a jamais reçu de récompense aux Victoires de la Musique. Une autre figure yéyé, Eddy Mitchell sera également distingué d’une Victoire d’honneur. Les Victoires ont décerné «plus de 800 récompenses» et marquent «une très belle histoire d’amour entre les artistes et le public», avait déclaré en janvier Alexandra Redde-Amiel, directrice du divertissement et des jeux de France TV. La cérémonie, en direct de la Seine musicale à Paris, est un «lieu de show», preuve de la «richesse» du patrimoine musical français, avait-elle considéré. Le rendez-vous cathodique a évolué au fil du temps, loin de sa 1ère avec ses vedettes, de Julien Clerc à Coluche. Après avoir multiplié ses catégories, parfois fourre-tout («album rap/reggae ou groove») ou niche («album de chansons pour enfant»), elle les a resserrées à 9. Les rappeurs sont parfois récompensées, d’IAM et MC Solaar en 1995 à OrelSan – l’un des artistes les plus primés avec 12 trophées -, mais les Victoires restent accusées d’un manque de représentativité du courant hip-hop, qui cartonne. En réponse à l’entre-soi, le système de vote a été refondu pour l’édition 2024, avec 2 tours: 882 professionnels de l’industrie musicale votent au 1er. Puis un jury de 32 personnes, sans les ayants droit directs – dont les labels – votent au 2d. «Ça répond aux critiques qui ont été faites et ça permet d’éviter que les Victoires reviennent aux plus forts ou aux plus malins», estime Vincent Frèrebeau, président de l’association des Victoires pour les éditions 2024 et 2025. «Ce qui était le cas auparavant, parce que la musique c’est un secteur artistique et culturel, mais aussi un marché» qui «attire toutes les convoitises», observe celui qui est aussi patron du label indépendant Tôt ou Tard. Même imparfaites, les Victoires demeurent une vitrine de la variété scrutée par la filière et, pour les artistes, une reconnaissance ou une rampe de lancement.