A 40 ans, Reporters sans frontières de plus en plus offensive

A 40 ans, Reporters sans frontières de plus en plus offensive

Reporters sans frontières (RSF), qui fête ses quarante ans, défend inlassablement la liberté de la presse tout en étant de plus en plus offensive pour lutter contre l’impunité des crimes commis contre les journalistes et la censure. Voici cinq choses à savoir sur cette ONG française. Créée en 1985 à Montpellier par 4 journalistes dont Robert Ménard, actuel maire de Béziers, RSF était à l’origine une petite association qui sensibilisait l’opinion avec des reportages sur les pays du tiers monde touchés par des tragédies. Quarante ans plus tard, la maison-mère de l’ONG compte une soixantaine de salariés et s’appuie sur un réseau d’environ 150 collaborateurs à l’étranger. En plus du siège international à Paris, elle dispose de quinze bureaux dans le monde. L’ONG est financée par des dons, des ventes d’albums, des fondations privées et des subventions publiques (Suède, Pays-Bas, UE…). La mission de RSF est «d’agir pour la liberté, le pluralisme et l’indépendance du journalisme et défendre celles et ceux qui incarnent ces idéaux», indique l’ONG. Elle agit concrètement en apportant une assistance physique et juridique aux journalistes sur le terrain, avec par exemple des prêts de casques et de gilets pare-balles ou en aidant les reporters forcés de fuir dans leurs demandes d’asile. L’ONG interpelle aussi les citoyens et les dirigeants avec des campagnes de mobilisation, des enquêtes et son classement géographique de la liberté de la presse publié depuis 2002 en huit langues. Ce classement qui fait référence mesure l’état de la liberté de la presse dans 180 pays à partir notamment «d’un relevé quantitatif des exactions commises envers les journalistes». Selon un rapport de l’UNESCO en 2024, 85% des meurtres de journalistes restent impunis. Pour éviter cela, le «recours offensif à la justice» est désormais un levier privilégié de l’ONG. En Ukraine, l’organisation a convaincu le procureur général de la gravité de ces crimes et a ainsi permis l’ouverture de 115 procédures sur des crimes contre les journalistes, alors qu’il n’y en avait aucune il y a trois ans, affirme RSF. L’organisation a également déposé cinq plaintes contre Israël auprès de la Cour pénale internationale pour «des crimes de guerre commis contre des journalistes à Gaza», où plus de 210 journalistes ont été tués depuis octobre 2023. L’ONG agit également en France, où elle a saisi en avril 2022 le conseil d’État pour contraindre le régulateur de l’audiovisuel (Arcom) à mieux surveiller le pluralisme sur la chaîne de télévision CNews, dans le giron du milliardaire conservateur Vincent Bolloré, et aux États-Unis, où elle a contesté en justice en mars le démantèlement des médias publics américains à l’étranger, initié par Donald Trump. «On voit en quarante ans à quel point les prédateurs de la liberté de la presse font preuve d’une inventivité extraordinaire «et RSF «a évolué au rythme des menaces», a expliqué Thibaut Bruttin, directeur général de RSF, qui a succédé à Christophe Deloire après son décès l’année dernière. Il revendique aujourd’hui une forme d’«hyper-activisme». En 2024, RSF a ainsi lancé un bouquet satellitaire d’informations indépendantes, produites en grande partie par des journalistes russes en exil depuis l’invasion de l’Ukraine. Autre innovation technologique pour contourner la censure des régimes autoritaires: «Collateral Freedom». Une opération qui maintient depuis 2015 l’accès à environ 150 médias censurés dans le monde en mettant à disposition des sites miroirs, des copies de sites web. Le risque, selon le directeur de RSF, est que le journalisme devienne marginal dans l’espace numérique et qu’il ne soit accessible qu’à une partie de la population. «Les personnes les plus fortunées que je connais sont toutes abonnées au «NYT», tandis que la majorité des citoyens «scrolle à l’infini», sans accès à une information fiable, déplore M. Bruttin.

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