Entre Canal+, favori à la stratégie encore incertaine, et de nouveaux entrants en embuscade, la consultation lancée par le football français pour ses droits TV vacants va agiter le marché jusqu’au 1er février, malgré un contexte peu favorable aux investissements majeurs. Les opérateurs intéressés pour racheter les 80% de la Ligue 1 et de la Ligue 2 remis en vente après le retrait du diffuseur défaillant Mediapro ont moins de deux semaines pour soumettre leurs offres. Si Canal+, qui réclame un appel d’offres sur l’intégralité des droits, pourrait contester cette procédure, la chaîne cryptée semble malgré tout incontournable. «Le principe de tout appel d’offres, c’est que les surprises sont possibles. Mais contrairement à 2018, la concurrence est actuellement quasiment réduite à néant», résume Pierre Maes, consultant et auteur du «Business des droits TV du foot». La chaîne cryptée est à ce jour la seule à avoir publiquement fait part de son intérêt pour le rachat du foot français. Elle a limité les pertes d’abonnés ces derniers mois et bénéficie d’une alliance signée en 2019 avec beIN Sports, lui permettant peut-être d’agir de concert avec le groupe qatari sur le dossier. «On peut presque parler d’un monopole, voire d’un duopole», confirme Pierre Maes. Mais la chaîne du groupe Vivendi, dirigé par Vincent Bolloré, a une épine dans le pied: elle est déjà sous contrat pour les 20% restants de la Ligue 1 à un prix négocié en 2018 (330 millions d’euros par an). Le patron de Canal+ Maxime Saada estime ce montant «surévalué» dans le contexte actuel et souhaite restituer ce lot pour qu’un appel d’offres global soit lancé, ce qui laisse redouter de nouvelles batailles juridiques. L’autre chaîne payante encore assez active dans le football, RMC Sport, semble loin des discussions, sur fond de mise en retrait de sa maison mère Altice (SFR) dans les droits sportifs. Un temps cité car ayant déjà tenté l’aventure en 2008, Orange, autre géant des télécoms, a démenti tout intérêt pour l’achat de droits. Quant à Free, qui dispose déjà d’un lot, celui des résumés de matches, pour près de 50 millions d’euros annuels, il reste très discret. En revanche, les chaînes gratuites sont revenues à la charge ces derniers jours, mais seulement pour proposer leurs services de manière transitoire et éviter l’«écran noir» de matches non-diffusés. TF1 comme M6 ont néanmoins rappelé qu’ils n’avaient pas vocation à se porter acquéreur des droits. Dans ces conditions, la Ligue pourrait tenter d’attirer un nouvel acteur, comme ce fut le cas à la fin des années 1990 avec TPS, en 2011 avec beIN Sports, ou en 2018 avec Mediapro.
Parmi les potentiels intéressés, Amazon est régulièrement cité. Frédéric Duval, directeur France de la plateforme de vente en ligne, n’a pas exclu l’hypothèse de se lancer dans un entretien à BFM Business fin 2020, se disant «intéressé par tout» sans vouloir commenter davantage. Amazon a en effet commencé à investir dans le football européen et diffusera une partie du tournoi de tennis de Roland-Garros dès 2021 en France. «Ils ne vont pas faire «all in», mais ils ont montré qu’ils étaient capables de mettre un billet de 100 à 150 millions d’euros annuels», explique Arnaud Simon, ancien patron d’Eurosport France. Dans la consultation lancée mardi par la Ligue, le lot C, ressemble un peu au lot ponctuel obtenu par la plateforme en Angleterre, celui des 10 matches du «Boxing Day», traditionnelle journée de Championnat du 26 décembre. Peut-on s’attendre à des entrants surprises? Peu probable s’agissant des géants Facebook, Netflix ou Apple, jugent les spécialistes. Quant à la plate-forme de sport en streaming DAZN, récemment lancée en France, son offre est pour le moment très minimaliste, mais elle est plus développée en Italie et en Allemagne. A très court terme, le pari peut paraître risqué avec un acteur aussi jeune sur le marché français, surtout au regard du fiasco Mediapro, autre nouvel entrant…