À l’heure où CANAL+ déploie sa nouvelle application dans plus de 40 pays, la plateforme affirme son ambition mondiale tout en conservant une forte empreinte locale. Rencontre croisée avec Églantine Leclabart, Directrice marketing global de la Pay TV, et Stéphane Baumier, Directeur des technologies et systèmes d’information. Ensemble, ils dévoilent les coulisses d’un écosystème technique et éditorial hors norme, pensé pour conjuguer innovation, fluidité d’usage et valorisation des contenus de CANAL+.
MEDIA +
La nouvelle app CANAL+ incarne un véritable virage vers une plateforme mondiale. Comment avez-vous construit une stratégie marketing cohérente dans plus de 40 pays ?
ÉGLANTINE LECLABART
Chez CANAL+, nous faisons le choix d’un équilibre subtil entre le global et le local, et c’est précisément ce qui fait notre singularité. Le contenu local est fondamental : il est très consommé par nos abonnés, et nous voulons absolument continuer à le valoriser. En parallèle, pour être performants sur le long terme, nous devons aussi globaliser notre infrastructure technologique. C’est dans cette optique que nous avons développé une plateforme unique, commune à tous les territoires. La plateforme CANAL+ est donc globale sur le plan technique, avec un socle commun qui permet au marketing de venir l’alimenter, que ce soit avec du contenu à la demande ou des programmes internationaux. Ce qui nous distingue, c’est notre capacité à conjuguer cette structure globale avec une réelle localisation. Par exemple, en Afrique, un abonné CANAL+ peut accéder à des contenus sénégalais, ivoiriens, mais aussi à l’ensemble des chaînes africaines intégrées dans l’application. Personne d’autre ne propose cela aujourd’hui. On applique cette même logique en Asie, en Europe centrale, partout où nous sommes présents.
MEDIA +
Avec près d’un million de contenus disponibles, comment hiérarchisez-vous cette offre ?
ÉGLANTINE LECLABART
Pour garantir une expérience fluide, simple et personnalisée, tout repose sur une combinaison entre technologie et intervention humaine. Évidemment, nous utilisons des moteurs de recommandation puissants, mais nous ne voulons pas perdre la main sur ce que nous proposons à nos abonnés. Nous tenons à rester éditeurs. C’est pourquoi nous avons des équipes expertes dont le métier est d’éditorialiser les contenus au quotidien. Elles analysent les tendances, les succès récents, l’actualité culturelle, pour proposer une mise en avant pertinente. Ensuite, les algorithmes viennent affiner ces recommandations. Mais l’humain reste au centre.
MEDIA +
La nouvelle ergonomie du player (icônes grossies, zapping au doigt, zoom, etc.) répond aux nouveaux usages. Quels enseignements utilisateurs ont guidé ces choix ?
ÉGLANTINE LECLABART
Nous avons observé les usages. Il devenait évident que certaines icônes, parfois un peu désuètes, rendaient la navigation difficile, surtout pour les nouveaux utilisateurs. Nous avons donc repensé l’interface dans sa globalité, en croisant les regards marketing et technologiques. Nous nous sommes inspirés des réflexes sur les réseaux sociaux, notamment chez les plus jeunes, pour créer une expérience intuitive. L’idée, c’est qu’il n’y ait pas besoin de mode d’emploi : vous augmentez le son ou la luminosité une fois, vous avez compris pour toujours. Et surtout, nous validons chaque fonctionnalité avec nos abonnés. Nous avons un panel de bêta-testeurs qui nous accompagnent à chaque étape. Leurs retours guident directement les évolutions de l’app.
MEDIA +
Comment valorisez-vous les contenus de la marque CANAL+ (cinéma, séries, sport) au sein d’un écosystème aussi dense ?
STÉPHANE BAUMIER
Nous avons une rubrique dédiée dans la home de l’app : l’univers CANAL+. Elle est pensée pour les abonnés fidèles à notre marque, qui cherchent nos créations originales. Ensuite, les algorithmes peuvent bien sûr recommander nos contenus, mais ce qui fait vraiment la différence, c’est notre rôle d’éditeur. Prenons l’exemple du programme «Les Loups-Garous». Si nous nous étions uniquement fiés aux données, cette émission n’aurait jamais été proposée. Elle ne ressemblait à rien d’existant. C’est bien notre intervention humaine qui l’a mise en avant. CANAL+ a une patte singulière, une vraie ligne éditoriale. On le voit sur les séries originales, mais aussi sur le cinéma – nos films arrivent dans l’application six mois seulement après leur sortie en salle, un avantage exclusif – ou encore sur le sport, avec des formats très immersifs comme les compétitions mécaniques, qui ont connu un véritable engouement cette année.
MEDIA +
L’app est désormais disponible dans les voitures (BMW, Renault), dans les avions (Air France), ou encore sur Apple Vision. Quel est l’objectif de ces partenariats ? Est-ce une stratégie d’omniprésence ?
STÉPHANE BAUMIER
Pas exactement. Nous ne cherchons pas à être partout, mais à être là où nos abonnés veulent consommer. C’est une logique de continuité d’expérience. Un abonné commence une série dans le métro sur son téléphone, il la reprend le soir sur sa télé, puis dans l’avion, et pourquoi pas dans sa voiture demain. Il doit pouvoir passer d’un écran à l’autre, sans rupture. C’est cette fluidité que nous cherchons à garantir. Et au-delà de l’usage, il y a un enjeu d’image. En nous associant à des marques comme Renault ou Air France, nous restons dans un univers premium, à la hauteur de notre exigence en matière d’innovation et d’expérience utilisateur.
MEDIA +
Avec des fonctionnalités comme le multi-live, la 4K HDR ou le mode expert, comment anticipez-vous les futurs usages et les capacités réseau à venir ?
STÉPHANE BAUMIER
Il y a en effet une logique de «toujours plus». Pour y répondre, nous travaillons avec les FAI afin d’optimiser les flux. Mais nous agissons aussi de notre côté: nous adaptons les débits selon le support. Un téléphone n’a pas besoin de la même qualité qu’un écran 60 pouces. Aujourd’hui, nous savons envoyer un flux optimisé selon l’appareil utilisé. Demain, avec l’intelligence artificielle, nous pourrons générer une image complète à partir de très peu de pixels, ce qui réduira drastiquement la bande passante nécessaire. C’est déjà en cours d’expérimentation. L’IA peut reconstruire huit pixels autour d’un seul. Cela pourrait diviser par huit le poids d’une image sans perte de qualité. Et nous avançons prudemment: notre priorité reste la stabilité de la plateforme, surtout à l’échelle mondiale.