Les femmes encore largement sous-représentées dans les médias

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Les femmes sont largement sous-représentées dans les médias, notamment parmi les experts invités, selon le premier rapport annuel du Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA) sur le sujet, présenté mardi à l’occasion de la Journée internationale des droits des femmes. «Globalement, les femmes sont moins représentées à l’antenne que les hommes», note le CSA, qui a analysé les données fournies par 40 des principales chaînes de télévision et stations de radio en 2015. Le régulateur de l’audiovisuel constate surtout une sous-représentation des femmes en tant qu’»experts», «intervenants» et «invités politiques». Dans la presse, 2015 a même marqué un «recul pour la visibilité des femmes», selon un rapport de la plateforme Pressedd publié lundi. On ne compte que 15,1% de femmes dans le classement général des 1.000 personnalités dont la presse a le plus parlé en 2015, un chiffre en baisse par rapport à 2014. La présence des femmes à l’antenne est pourtant «très importante pour l’image que les femmes et les hommes ont de la norme», a déclaré Sylvie Pierre-Brossolette, conseillère au CSA en charge du rapport. «Il faut absolument rééquilibrer cette image-là, sinon les filles continueront à penser que même avec leurs diplômes, elles ne peuvent pas avoir le même travail que les hommes», estime-t-elle. Le rapport pointe notamment les émissions de France 5 «C dans l’air», qui n’a fait appel en 2015 qu’à 25% d’expertes, et «C politique» avec 19% d’invitées politiques. «Le taux d’expertes tombe même à moins de 20% pour Canal+», note le CSA. Il y a cependant autant de femmes que d’hommes parmi les présentateurs et journalistes à la télévision, voire plus sur certaines chaînes comme France Ô ou Paris Première. Concernant les chaînes d’info, la proportion des femmes dans les catégories «experts», «autres intervenants» ou «invités politiques» ne dépasse pas 30% en moyenne. France Télévisions, qui doit être «exemplaire» selon Sylvie Pierre-Brossolette, s’est engagé à avoir 35% d’expertes dans ses émissions fin 2016. Le groupe public, associé à Radio France et à l’agence de formation Egalis, avait déjà lancé un annuaire gratuit censé faciliter la tâche des journalistes, le «Guide des expertes». Les radios, de leur côté, «semblent éprouver plus de difficultés à mettre des femmes à l’antenne (notamment RMC avec 17% de présentatrices et animatrices)», relève le CSA. France Inter n’a par exemple invité que 20% d’expertes dans sa matinale. La radio musicale FIP, de son côté, se démarque avec un pourcentage record de 98% de voix féminines, sa marque de fabrique. «Ca fait partie d’un exercice de responsabilisation. Il est très important que les chaînes fassent elles-même le décompte, pour qu’elles se rendent compte», a souligné Sylvie Pierre-Brossolette. Un an et demi après le vote de la loi sur l’égalité réelle, qui a rendu ces déclarations obligatoires, 2015 était une année de «rodage», précise la conseillère, qui estime qu’on «essaiera de progresser d’ici l’année prochaine». Par ailleurs, le Conseil a salué dans son rapport le «nombre important» de programmes luttant contre les préjugés sexistes et les violences faites aux femmes. De son côté, le collectif de journalistes «Prenons la Une», qui s’est fait connaître en 2014 avec un manifeste dénonçant le manque d’expertes dans les médias, a déploré mercredi leur manque d’initiatives. «Un simple état des lieux annuel ne suffira pas à faire progresser la part des femmes dans les médias», a regretté le collectif, demandant à ce que les chaînes s’engagent sur des objectifs de progression pour l’année 2016. «Plus que jamais, nous demandons que les discours sur la représentation des femmes dans les médias soient accompagnés d’actions concrètes, pour que l’année prochaine, lors du prochain rapport du CSA, les médias n’apparaissent plus comme une caricature de notre réalité», a réclamé le collectif dans un communiqué.