Fête du cinéma: les législatives vont-elles faire de l’ombre ?

«On sort voter, et on peut tout à fait faire un crochet pour voir un film !»: au Lumière de Vierzon, comme dans les 2.000 autres cinémas de France, on prie pour que les législatives ne fassent pas d’ombre dimanche à la Fête du cinéma. Dans la paisible sous-préfecture du Cher, Aurélie Delage, qui vient de reprendre l’exploitation du cinéma de sept salles en centre-ville, s’active pour ce temps fort de l’année. Du 30 juin au 3 juillet, ici comme ailleurs en France, toutes les séances sont au tarif de 5 euros. «On a des gens qui viennent voir un seul film, et d’autres qui enchaînent les séances et se font un petit marathon», poursuit la dirigeante. Cette année, le climat politique pourrait peser, le premier tour des élections législatives ayant lieu le dimanche 30 juin, mais Aurélie Delage veut voir le verre à moitié plein. «Les gens auront envie d’évasion, et de sujets plus légers. Nous, on reste un loisir culturel accessible», souligne-t-elle. Optimisme partagé au niveau national par la Fédération des cinémas français (FNCF): «la campagne électorale n’empêche pas les gens d’aller au cinéma, on offre un moment de respiration», estime Marc-Olivier Sebbag, son délégué général. D’autant que si les citoyens accomplissent leur devoir, ils «auront tendance à moins partir en week-end» et seront libres pour un film, espère-t-il. Spécialiste de l’analyse du box-office, Eric Marti de la société Comscore, est «très optimiste pour la Fête du cinéma» et ne prévoit pas d’impact du scrutin, sauf en cas de troubles publics dans les rues au lendemain des résultats. A la peine depuis le début de l’année, avec un recul allant jusqu’à -35% en avril, la fréquentation des cinémas français s’est brusquement réveillée en mai avec le carton totalement inattendue de la comédie «Un P’tit truc en plus», signé Artus. Le film a déjà fait plus de 7,3 millions d’entrées, et reste à l’affiche de centaines de salles pour la Fête du cinéma. Les familles pourront également aller voir «Vice Versa 2», le film d’animation de Pixar qui a très bien démarré, tandis que les ados frissonneront devant le film d’horreur «Sans un bruit: jour 1». Laurence Arné et son compagnon, Dany Boon, espèrent remporter leur part du gâteau avec «La famille Hennedricks», tandis que «Kinds of Kindness», de Yorgos Lanthimos, est le premier gros titre cannois à sortir en salles. Mais le film qui joue le plus gros lors de cette Fête du cinéma est «Le conte de Monte-Cristo», avec Pierre Niney dans le rôle-titre. La plus importante production française de l’année sort tout spécialement vendredi et espère poursuivre sa carrière tout l’été. Car après une période de vaches maigres au premier semestre, marquée par un manque de grosses productions américaines, de nombreux films retardés par la grève des scénaristes à Hollywood l’an dernier sont attendus au deuxième semestre. Difficile pourtant de trouver pendant les vacances d’été des titres aussi porteurs que «Barbie» et «Oppenheimer», cartons de l’an dernier. Les professionnels tablent sur «Moi, Moche et Méchant 4 (10 juillet), un nouveau «Twister» (17 juillet) sur les chasseurs de tornades ou un Marvel ambitieux, «Deadpool & Wolverine» (24 juillet), avec Ryan Reynolds et Hugh Jackman. Côté français, outre «Monte Cristo», les nouvelles aventures de Largo Winch (31 juillet) ou la comédie musicale de Jacques Audiard, «Emilia Perez», doublement primée à Cannes (21 août), sont cités. Les Jeux Olympiques laisseront-ils le temps aux spectateurs d’aller au cinéma ? L’impact devrait être mineur et se concentrer sur la fin de la compétition, tout comme celui de l’Euro de foot, notable seulement si la France va loin dans les phases finales, analyse Eric Marti. Qui se projette déjà sur l’automne, et les grosses sorties attendues, du nouveau Gladiator à la suite de Joker.