L’accord entre 136 pays annoncé vendredi par l’OCDE sur la taxation mondiale des multinationales repose sur trois mesures principales, âprement négociées entre Etats ces derniers jours.
– Le taux d’imposition minimal des multinationales : Des trois sujets sensibles de la négociation, c’est celui qui a vu le dénouement le plus rapide, dès jeudi avec l’annonce du feu vert de l’Irlande qui abrite nombre de sièges européens de multinationales américaines telles que Facebook, Apple et Google. La formulation finale de l’accord parle d’un taux de taxation minimum fixé à 15% pour les entreprises réalisant au moins 750 millions d’euros de chiffre d’affaires.Un Etat pourra par ailleurs taxer les profits étrangers d’une de ses entreprises nationales qui aurait été imposée à l’étranger à un taux inférieur à 15%, afin de compenser l’écart. Les entreprises réalisant des activités de transport maritime international sont exclues de l’accord.
– Sur quelle base calculer l’impôt?: Ce sujet hérissait un pays comme la Hongrie, soucieuse de préserver son attractivité fiscale grâce à un impôt sur les sociétés de seulement 9%. Concrètement, les entreprises pourront déduire de la base imposable une partie de la masse salariale et des actifs réels, tels que les stocks, les équipements… Pendant dix ans, les entreprises pourront exclure un montant équivalent à 8% de la valeur des actifs réels et 10% de la masse salariale. Le taux passera à 5% ensuite dans les deux cas. C’est plus généreux que ce qui était envisagé précédemment. L’idée en filigrane est que certaines entreprises implantées dans des territoires à la fiscalité avantageuse y réalisent de réelles activités, et doivent être moins pénalisées que celles qui choisissent une implantation pour des raisons purement fiscales.
– La nouvelle répartition des droits à taxer : Cette partie de la réforme vise à redistribuer aux Etats une partie des bénéfices réalisés par les très grosses multinationales sur leur sol, mais qui parfois s’évapore par le jeu de l’optimisation fiscale. Elle concerne seulement les entreprises enregistrant plus de 20 milliards d’euros de chiffre d’affaires (un seuil potentiellement ramené à 10 milliards au bout de sept ans) et qui dégagent une rentabilité élevée, à l’exception des industries extractives ou des services financiers réglementés. La part des bénéfices taxés dans ce cadre, objet d’un savant calcul, a été fixée à 25% au-delà d’un niveau de rentabilité de 10%. L’entreprise doit réaliser au moins un million d’euros de chiffre d’affaires dans un Etat pour que ce dernier puisse bénéficier de la mesure, ou 250.000 euros si le PIB de l’Etat est inférieur à 40 milliards d’euros. Cette disposition permet aux pays «où il y a des clients, de récupérer une fraction du bénéfice, et de l’imposer», souligne Gaëlle Menu-Lejeune, avocate fiscaliste au sein du cabinet Fidal, évoquant un «complément d’impôt» pour ces Etats.