En 48 heures, une application change de nom et de public cible après avoir réveillé une vive polémique: le micro-scandale Crush a remis en lumière les doutes sur la capacité des plateformes pour mineurs à assurer la sécurité de leurs utilisateurs. Tout est parti d’une série de vidéos postées le weekend dernier par une influenceuse: Ophénya (4,9 millions d’abonnés sur TikTok) fait la promotion de l’application qui promet à un public de 10 à 21 ans de «découvrir qui crush (a un coup de coeur, NDLR) sur toi». Le concept fait réagir sur le réseau social X (anciennement Twitter), le public mêlant mineurs et majeurs sans vérification d’âge. La polémique persiste malgré les dénégations de son créateur Marc Allain, qui assure que Crush n’est qu’une application de «sondages entre potes». Contacté, il précise qu’aucune messagerie ne permet d’entrer en relation: «Ceci permet de s’assurer que, même si des utilisateurs illégitimes s’inscrivent, ils ne puissent causer aucun tort». L’application a néanmoins restreint, depuis, l’âge de son public de 13 à 18 ans et changé de nom pour devenir Friendzy, afin d’effacer toute connotation amoureuse. C’est en effet ce qui déclenchait les plus vives critiques, renvoyant à une série de polémiques au sujet d’applications et autres sites de rencontre. En août, Rencontre-ados était visé par plusieurs enquêtes médiatiques, qui révélaient l’envoi massif de messages sexuels à des mineurs. L’application était supprimée du Play Store de Google, qui permettait de la télécharger, et le ministre délégué au Numérique Jean-Noël Barrot déclarait saisir la justice, mais le site reste accessible. Si la version 13-18 ans de Tinder a été fermée en 2016, de nombreux autres sites ou applications de rencontres amoureuses se maintiennent. Et les risques de prédation sexuelle ne se limitent pas à ces plateformes: ils existent aussi sur les réseaux sociaux ou sur d’autres applications de rencontres amicales, surtout lorsque celles-ci ne déploient pas un niveau de sécurité suffisant. Pour Samuel Comblez, psychologue et directeur des opérations de l’association e-Enfance, l’un des principaux dangers réside dans l’absence de vérification de l’âge, et la mise en contact entre majeurs et mineurs. «Un enfant de 13 ans n’a pas les mêmes besoins et n’a pas la même capacité d’interaction et de protection qu’un adulte de 21 ans», souligne-t-il. Quant à la modération, souvent trop faible, elle expose les adolescents à des contenus inadaptés, explique le psychologue. Un risque d’autant plus important lorsque la fréquentation de ces sites s’effectue «à l’abri du regard des parents», ce qui les prive d’un interlocuteur. Face aux critiques et aux évolutions législatives (vote en France d’une loi sur la majorité numérique contraignant les moins de 15 ans à obtenir une autorisation parentale pour s’inscrire sur un réseau social ou encore règlement européen DSA obligeant les grandes plateformes à lutter contre les contenus illicites), certains tentent de relever leur niveau de sécurité. Yubo, une application française créée en 2015 à destination de la génération Z (entre 13 et 25 ans), a longtemps été surnommée le Tinder des jeunes. Elle s’est vu reprocher les dérives de ses utilisateurs mais se targue aujourd’hui d’être pionnière en matière de protection et de «progresser en permanence», selon sa directrice juridique Sharone Franco.
Accueil Internet Internet - Aujourd'hui dans le monde Friendzy remplace Crush après des inquiétudes sur la protection des jeunes utilisateurs