Les fabricants de smartphones en quête d’attractivité

380

Produit phare de l’électronique grand public depuis plus d’une décennie, le smartphone est-il devenu moins «sexy»? Les fabricants misent sur le Salon mondial du mobile de Barcelone (MWC) pour susciter un regain d’intérêt dans un marché en berne, malgré un manque d’innovations «flagrantes». «2023 sera une année difficile», prévient le cabinet Canalys, alors que les ventes mondiales de smartphones ont chuté de 11,3% en 2022 à 1,21 milliard d’unités – soit le nombre «le plus faible depuis 2013», selon le cabinet d’études spécialisé IDC. En cause notamment: le climat d’incertitude né de la guerre en Ukraine et la flambée de l’inflation, qui a pesé sur le pouvoir d’achat des ménages moins enclins à renouveler leurs appareils. Pour atténuer ces effets négatifs, alors que «les habitudes d’achats sont en train d’aller vers des smartphones de plus en plus haut de gamme», certains fabricants mettent en place plusieurs mécanismes pour faciliter l’acquisition des nouveaux produits, comme «la reprise» de l’ancien mobile ou le paiement «en plusieurs fois sans frais», explique François Hernandez, vice-président France en charge de la mobilité chez Samsung. En 2023, les leaders du marché, Samsung et Apple, restent ainsi les «mieux placés pour naviguer dans les incertitudes actuelles grâce à leur domination du haut de gamme», à l’image des modèles iPhone Pro du géant américain ou le «segment de niche premium» du fabricant sud-coréen avec sa gamme Fold de modèles pliables, pronostique Le Xuan Chiew, analyste chez Canalys. En revanche, les fabricants chinois (Xiaomi, Oppo, Honor…) «sont toujours vulnérables aux vents contraires du marché international et à un marché intérieur très compétitif», ajoute l’analyste. Si la sortie des nouveaux smartphones, objets électroniques devenus incontournables au quotidien, ne suscite plus les mêmes attentions que par le passé, est-ce aussi à cause d’un manque d’innovations technologiques spectaculaires, à l’image du passage de la 3G à la 4G, l’introduction des écrans tactiles ou l’émergence des nouveaux modèles pliables ? «Effectivement, il y a moins d’innovation de rupture», souligne Thomas Husson, analyste chez Forrester. «Il y a une perception d’ensemble qui est relativement partagée, où on se dit: «Finalement, du Samsung S22 au S23, de l’iPhone 13 à l’iPhone 14, il n’y a pas de saut quantique en matière d’innovation». En réalité, «il y a l’innovation qui est perçue car elle est flagrante et celle qui se voit moins. Mais, aujourd’hui, les processeurs ou la qualité des écrans sont bien meilleurs que ce qu’on trouvait» auparavant, plaide François Hernandez de Samsung, citant aussi l’amélioration continue des appareils photo. Dans un secteur toujours en quête de ses nouvelles frontières en attendant l’émergence de nouveaux usages permis par la 5G, l’essor de l’internet spatial, notamment sous l’impulsion du réseau Starlink de l’américain SpaceX, devrait favoriser le développement de la fonctionnalité «satphone» (contraction de «satellite» et «smartphone») sur les prochains mobiles. Apple a déjà devancé ses concurrents en intégrant dans ses nouveaux iPhone 14 la possibilité d’envoyer des SOS par satellite. A Barcelone, Xiaomi, Honor, Motorola, Nothing, Oppo et Vivo ont riposté en annonçant lundi qu’ils «travaillent» avec le fabricant de puces électroniques Qualcomm pour développer «des smartphones dotés de capacités de communication par satellite». Alors que Samsung investit 20 milliards de dollars par an dans la recherche et développement, François Hernandez estime que la «prochaine frontière» sera «une intégration encore plus forte de l’intelligence artificielle» dans l’écosystème interconnectant les smartphones aux autres appareils électroniques (montres connectés, écouteurs…). «Je pense qu’on est loin d’être arrivé à la fin de l’histoire», appuie l’analyste Thomas Husson, citant encore l’arrivée croissante des «capteurs» dans les appareils mobiles.