Les technologies quantiques, auxquelles Emmanuel Macron va consacrer 1,8 milliard d’euros, utilisent des propriétés surprenantes de la matière à l’échelle de l’infiniment petit. Déjà à l’oeuvre dans des objets du quotidien, leur mécanique est porteuse de ruptures majeures en matière de calcul et de communications, même si des obstacles demeurent. La physique quantique, différente de la physique classique, est un outil de description de la matière à l’échelle microscopique (photons, électrons, atomes…), un monde aux lois si singulières qu’elles déroutent les scientifiques eux-mêmes. La discipline est née au début du XXe siècle, lorsqu’on a voulu clarifier la nature de la lumière: était-elle onde ou particule ? Albert Einstein révolutionne le monde, en expliquant que la lumière était à la fois onde et particule. Ce double visage de la lumière implique que les objets et les particules qui les forment ont un comportement dual, et peuvent se retrouver dans plusieurs états à la fois. La physique quantique a permis de nombreuses inventions très concrètes: sans elle, pas de transistors, de lasers, de circuits intégrés, de GPS… Dans les années 1980, un nouvelle propriété stupéfiante de la matière fut découverte, ouvrant la voie à une deuxième révolution: l’intrication.Son principe: deux particules peuvent se retrouver corrélées quelle que soit la distance géographique qui les sépare. Cette paire de particules intriquées se comporte comme une seule et même entité, reliée comme par un fil invisible. Cette propriété permet de concevoir des communications ultra-sécurisées, voire inviolables, qui utilisent des photons pour envoyer les clés de cryptage nécessaires au codage de l’information. Les données contenues dans ces photons sont impossibles à intercepter, car toute tentative d’espionnage détruirait le message lui-même (comme si on ouvrait la boîte du chat). L’Union européenne vient d’annoncer le prochain lancement d’une nouvelle constellation de satellites utilisant cette technologie. En informatique, les potentialités de l’intrication sont immenses: les qubits superposés sont enchevêtrés, pouvant interagir entre eux. Plusieurs calculs peuvent être menés en parallèle, et de manière exponentielle. La révolution la plus attendue est celle de l’ordinateur quantique universel. Il serait capable de traiter des masses de données dantesques (climatiques, pharmaceutiques…) grâce à des opérations dépassant l’imagination, à l’instar de celle de Google qui, en 2019, a réussi un calcul en trois minutes versus… 10.000 ans ! Les ordinateurs classiques deviendraient ainsi incapables de rivaliser avec une machine quantique – on parle de «suprématie».
Autre promesse: les capteurs quantiques, ultra-sensibles, permettraient des mesures extrêmement précises, comme celle de la gravité dans l’espace. Ces technologies se heurtent à un obstacle physique appelé «décohérence», qui fait disparaître les propriétés quantiques au contact du monde extérieur. Pour manipuler des qubits, il faut ainsi choisir des atomes froids, pour éviter qu’ils bougent, et les isoler. Mais plus il y a de qubits, plus ils perdent leurs capacités, et on n’arrive pas actuellement à en intriquer plus d’une cinquantaine. Il existe actuellement des systèmes hybrides quantiques/classique, mais l’ordinateur quantique universel n’est pas pour demain. La décohérence freine également les innovations dans la communication spatiale, où, par voie hertzienne, les nombreuses interactions génèrent des pertes de transmission.
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