Depuis son lancement en France, «Les Traîtres», de retour le 3 avril sur M6, a su s’imposer en transformant un simple jeu de mensonge en un véritable thriller télévisuel haletant. Mathieu Chalvignac, producteur artistique chez Studio 89, nous plonge dans les coulisses d’un succès en constante évolution.
MEDIA +
Comment envisagez-vous le renouvellement du format «Les Traîtres» pour éviter l’effet de lassitude ?
Mathieu CHALVIGNAC
Le renouvellement du format repose sur plusieurs axes stratégiques. Tout d’abord, le casting est un élément clé : chaque saison, nous réunissons des personnalités aux profils variés, qui vont interagir de manière totalement inédite. Même en reprenant les mêmes règles de jeu, la dynamique change complètement en fonction des candidats. Ensuite, nous travaillons l’évolution des mécaniques du jeu. Nous introduisons de nouvelles règles, de nouvelles missions et des rebondissements qui maintiennent l’effet de surprise. Le lieu de tournage joue aussi un rôle important. Nous avons changé de château pour la saison 4 afin d’apporter une nouvelle dimension au jeu et de renouveler l’ambiance visuelle. L’idée est de créer un cadre immersif qui favorise le suspense et l’imprévu. Enfin, le montage et la narration évoluent en permanence. Nous traitons l’émission comme une véritable série avec des cliffhangers, des intrigues secondaires et une mise en scène qui rappelle le cinéma. Nous avons affiné ce travail au fil des saisons pour offrir une expérience toujours plus captivante. L’objectif est clair : garder l’ADN du jeu tout en apportant des éléments de surprise qui empêchent toute routine, aussi bien pour les candidats que pour le public.
MEDIA +
L’émission adopte un montage très scénarisé. Quels sont les défis en post-production ?
Mathieu CHALVIGNAC
Nous avons une approche pensée comme une véritable série tv. Dès le tournage, nous préparons des séquences très stylisées : des déambulations des traîtres, des plans travaillés avec un cadreur dédié, un choix de caméras offrant un grain plus cinématographique (changé depuis la saison 3). En post-production, nous avons voulu casser les codes classiques du divertissement. Contrairement aux émissions traditionnelles qui commencent avec un pré-générique explicatif, nous faisons une entrée en matière plus immersive, où Eric Antoine, le maître du jeu, plante l’univers progressivement. Chaque épisode est monté en 52’ avec une structure de série : previously (résumé de l’épisode précédent), cliffhanger à la fin pour donner envie de voir la suite et coming next pour teaser l’épisode suivant. Nous avons aussi travaillé la bande-son en nous inspirant de séries comme «Succession» et «The White Lotus», dont certaines musiques influencent notre habillage sonore. Tous ces éléments créent une identité unique au programme.
MEDIA +
Quelles sont vos contraintes logistiques et techniques majeures ?
Mathieu CHALVIGNAC
Le tournage des «Traîtres» est une prouesse logistique. Tout d’abord, le choix du château est déterminant. Il ne s’agit pas seulement de trouver un lieu esthétiquement fort, mais un site qui répond aux contraintes de production. Par exemple, la salle de la table ronde doit être suffisamment grande pour accueillir les joueurs et les caméras tout en conservant une atmosphère immersive. Or, en France, beaucoup de châteaux ont des espaces restreints, ce qui limite les options. Autre enjeu majeur : le logement des candidats. Lors des trois premières saisons, l’hôtel était situé à quelques minutes du château. Pour la saison 4, nous avons trouvé un site où les candidats dorment directement sur place, ce qui renforce l’immersion et simplifie les déplacements. Cela évite aussi la fatigue liée aux trajets nocturnes après les tables rondes et les conseils des traîtres. Sur le plan technique, l’organisation du tournage est extrêmement millimétrée. Nous avons plus de 80 personnes sur place, avec des équipes dédiées à chaque aspect de la production : cadreurs, preneurs de son, réalisateurs, monteurs en temps réel… La mise en place des épreuves est un autre défi, car elles doivent rester secrètes jusqu’au dernier moment. Nous avons donc des ateliers de construction dissimulés dans le château ou à proximité pour éviter toute fuite d’information. Enfin, la gestion du rythme de tournage est un élément clé. Les journées sont longues et intenses pour les candidats, et il faut s’assurer qu’ils restent impliqués sans épuisement. C’est un équilibre délicat entre la dynamique du jeu et le respect du bien-être des participants.
MEDIA +
Avec le succès du format, envisagez-vous des déclinaisons ?
Mathieu CHALVIGNAC
«Les Traîtres» a ouvert la voie aux jeux d’enquête et de rôle à la télévision française. Nous avons déjà exploré certaines pistes, comme une deuxième partie de soirée depuis la saison 3 avec Juju Fitcats. Nous réfléchissons en permanence à de nouvelles idées pour enrichir l’univers du jeu. Il y a bien sûr des discussions autour d’une version anonyme, mais pour l’instant, le format célébrités fonctionne très bien. Chez Studio 89, nous avons également lancé «The Power», un autre jeu basé sur une mécanique de rôle caché. Le succès des «Traîtres» nous pousse à explorer d’autres formats innovants dans cette veine. Nous avons encore beaucoup à raconter avec ce programme. Chaque saison apporte son lot de surprises, et l’engouement du public nous conforte dans l’idée que «Les Traîtres» a encore un bel avenir devant lui.
LES DIRIGEANTS
F.DUHAYOT
DG
COORDONNEES
114 Avenue Charles de Gaulle
Neuilly-sur-Seine
DATE DE CREATION
2004
PRODUCTIONS
«Les Traîtres», «Top Chef», «Cauchemar en cuisine»…