Le baron de la drogue Pablo Escobar n’est plus, au début de la 3ème saison de «Narcos», mais la saga sur le trafic de cocaïne garde son potentiel addictif en se focalisant désormais sur le cartel de Cali. Cette organisation rivale du cartel de Medellin, que dirigeait Escobar, s’est emparée du marché de la poudre blanche après la mort du charismatique «roi de la cocaïne», abattu par la police locale en 1993. Les «gentlemen» de Cali, comme ils étaient surnommés, géraient leurs affaires avec discrétion et efficacité, comme des patrons du CAC 40, aux antipodes des frasques du flamboyant Escobar. Si ce dernier adorait la célébrité, donnait une part de sa fortune aux déshérités et réglait ses comptes avec une violence sanguinaire affichée, les parrains de Cali -du nom de la ville du sud-ouest de la Colombie d’où ils opéraient- préféraient nouer des alliances avec les puissants en distribuant pots-de-vins et faveurs. Au début des années 90 le «KGB de Cali» -appelé ainsi en raison de son réseau de renseignements sophistiqué- contrôlait jusqu’à 90% du marché de la cocaïne mondial et brassait 12 milliards de dollars de revenus, ayant dépassé la puissance et l’ampleur du cartel de Medellin. Il a été décrit par la police fédérale américaine des stupéfiants (DEA) comme «l’organisation de trafic de drogue internationale la plus puissante de l’histoire». «Tandis que tout le monde était focalisé sur Pablo», ce cartel «se formait, plus professionnel, plus secret», a raconté le producteur exécutif de «Narcos», Peter Friedlander, avant la 1ère mondiale de la saison 3 à Bogota. Alors qu’Escobar contrôlait tout, le cartel de Cali était géré par un conseil de 4 hommes. Gilberto Rodriguez Orejuela, incarné par Damian Alcazar dans «Narcos», était le dirigeant suprême, surnommé «le Joueur d’échec» parce qu’il avait toujours un coup d’avance sur ses ennemis. Son jeune frère et bras droit, Miguel (Francisco Denis), s’occupait des affaires légales du cartel, y compris le club de foot local, America de Cali. Francisco «Pacho» Herrera (Alberto Ammann) était la brute du quartet, tueur sans scrupules en charge de la distribution internationale, tandis que Jose «Don Chepe» Londono (Pepe Rapazote) menait les opérations à New York. Mais si le cartel de Medellin voulait que tout le monde soit terrorisé par le sang qu’il faisait couler, accrochant des cadavres aux yeux de tous, celui de Cali se voulait plus discret, jetant les cadavres enroulés dans du fil barbelé dans les rivières. Les victimes d’Escobar se comptaient par milliers, tandis que beaucoup des «disparitions» orchestrées par les barons de Cali ne figuraient même pas dans les statistiques. «L’économie prospérait. On se sentait protégés de la guerre contre Medellin. Et puis cette bulle a éclaté et nous avons vu toute la corruption, et comment la moralité s’était délitée», explique le co-producteur exécutif Andi Baiz, 42 ans. La 3ème saison, disponible en streaming sur Netflix depuis vendredi, s’ouvre avec le patron, Gilberto, qui négocie un accord avec les autorités colombiennes, offrant notamment de renoncer à ses laboratoires de stupéfiants à condition qu’il n’ait pas à faire de prison ou à renoncer à sa fortune. L’agent de la DEA Javier Pena, joué par Pedro Pascal, fait alors équipe avec de nouveaux partenaires pour faire chuter les frères Rodriguez. En cela, le trio est aidé par le chef de la sécurité du cartel, Jorge Salcedo, qui a retourné sa veste, craignant pour sa vie. Salcedo fait maintenant partie d’un programme de protection de témoins aux Etats-Unis. Les frères Rodriguez, qui ont à présent plus de 70 ans, ont quant à eux été arrêtés dans les années 90 mais n’ont passé que quelques années derrière les barreaux en Colombie. Leurs vrais problèmes n’ont commencé qu’en 2006, lorsqu’ils ont été extradés vers Miami pour avoir fait importer 200.000 kilos de cocaïne aux Etats-Unis. Ils croupissent à présent dans des prisons fédérales en Caroline du Nord et Sud, leur fortune envolée, sans vrai espoir de revoir le jour.