Q. DE REVEL (Groupe M6) : «Nous réétudions notre approche du projet de feuilleton quotidien»

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Le Groupe M6 investit sur la fiction et compte solidifier son positionnement. Outre un projet de feuilleton quotidien à l’étude, et le succès majeur de «Scènes de Ménages» au quotidien depuis bientôt 15 ans, la Six veut s’imposer en Prime Time, créer des ponts avec 6play, et collaborer de plus en plus avec des plateformes de streaming. Que développent-ils ? Quelle est leur stratégie ? Entretien avec Quentin DE REVEL, Directeur de la Fiction du Groupe M6.

Comment le groupe M6 répond-il aux attentes des nouvelles générations de téléspectateurs en matière de fiction ?

Le groupe M6 s’efforce de répondre aux attentes des nouvelles générations de téléspectateurs en matière de fiction en s’appuyant sur sa tradition de séries courtes à succès, telles que «Scènes de Ménages» ou «La Petite Histoire de France», qui attirent d’importantes audiences en particulier sur les moins de 50 ans. Tout en préservant ce socle, M6 cherche à introduire régulièrement de nouvelles séries en prime time. On ne cherche pas à rajeunir délibérément notre public mais on vise à captiver une audience la plus vaste possible, en raisonnant quasiment en 4+. M6 se positionne aussi comme une chaîne qui souhaite se démarquer, malgré le fait que nous offrons moins de créneaux de prime time pour les fictions (10 à 15 par an) comparée à nos concurrents qui en proposent six fois plus. Mais attirer les jeunes sur nos fictions est un enjeu majeur. Comme toutes les chaînes traditionnelles, nous observons un vieillissement de l’audience autour des fictions. Ce glissement vers un public de plus de 50 ans est lié à la migration des jeunes consommateurs vers les nouveaux usages : les plateformes américaines et nos plateformes comme 6play qui est l’un de nos gros axes de développement.

Comment s’articule votre travail autour des fictions SND ?

L’autre aspect de mes responsabilités concerne en effet les fictions produites par SND que nous fournissons à différents diffuseurs. Nous travaillons actuellement avec des plateformes américaines sur des projets qui n’auraient pas nécessairement leur place sur M6. Un de nos grands challenges est de produire un jour pour nos illustres concurrents que sont TF1 et France Télévisions. Dans les mois à venir, le défi principal sera d’étendre cette nouvelle branche d’activité.

Quels sont les principaux défis auxquels sont confrontées vos «fictions antennes» ?

M6 doit maintenir et renforcer son impact auprès des téléspectateurs. Pour cela, il est crucial de créer des contenus originaux qui respectent les codes de la fiction française de Prime Time sans ressembler aux autres. C’est un équilibre très délicat à trouver entre l’innovation et la conformité aux standards attendus par le public. L’un des enjeux consiste à développer des comédies événementielles en réponse à une demande de légèreté exprimée par les téléspectateurs. Un autre axe stratégique est de produire des mini-séries singulières. Étant donné que M6 ne dispose pas d’assez de créneaux de fiction pour instaurer une habitude chez les téléspectateurs, la chaîne doit être d’autant plus perspicace dans la sélection et la promotion de ses programmes.

Où en est le projet de feuilleton quotidien sur M6 ?

Il est actuellement en pause. Nous réétudions les options et notre approche du projet. La concurrence s’est accrue depuis l’annonce de l’arrivée de «Plus belle la vie» sur TF1. Cela nous amène à réfléchir différemment. Nous envisageons même la possibilité de diffuser notre série quotidienne sur une chaîne différente de M6. Toutes les options restent ouvertes. Un feuilleton quotidien doit reposer sur sa vitrine en linéaire et sa puissance en replay. Donc, pourquoi pas W9 avec un complément 6play.

Avec la montée des plateformes de streaming, comment envisagez-vous l’avenir de la diffusion traditionnelle de la fiction sur les antennes du Groupe M6 ?

Cela fait l’objet de discussions quotidiennes. L’objectif est de renforcer l’attractivité de la plateforme 6play en offrant du contenu premium et exclusif, y compris des diffusions en avant-première pour s’adapter aux nouvelles habitudes de consommation. Le groupe M6 explore également les possibilités de collaboration avec les plateformes de streaming pour partager la valeur générée par les contenus. Des accords sont déjà en place pour certaines séries, et bien que cela ne soit pas une politique systématique, la possibilité d’associer davantage de productions M6 à des plateformes de SVOD est considérée comme fructueuse. Cette stratégie présente deux avantages majeurs : elle permet de réduire les coûts de production et elle augmente significativement la visibilité des programmes.

Quels genres de fiction voyez-vous comme étant particulièrement porteurs ?

S’agissant de M6, il y aura toujours une prime à la comédie. Cependant, notre stratégie se concentre davantage sur la promesse et l’attrait de la fiction plutôt que sur son genre. En ce qui concerne les fictions SND, il faut être pragmatique : les choix sont guidés par des coups de cœur pour des sujets qui nous passionnent mais sont aussi susceptibles de convaincre un diffuseur !

Des synergies sont envisagées entre les pôles «fictions SND» et «fictions antennes» ?

SND produit actuellement pour W9 le troisième volet de «Escape», dans lequel on prévoit de faire monter une plateforme au financement. Sinon, les synergies se manifestent surtout en termes de réseaux, de discussions avec les équipes et de partage d’information. Il existe une collaboration étroite avec SND Cinéma, qui bénéficie de 25 ans d’expérience et apporte au groupe une solidité, une crédibilité ainsi qu’une puissance financière. Un exemple récent de cette synergie est l’acquisition des droits de «Fantomas», qui illustre la collaboration entre le cinéma et la fiction télé, puisque nous développons simultanément un film et une série sur ce sujet.

Les projets en cours ?

Sont attendus «Brigade Anonyme»  avec Eric Cantona produit par Bonne Pioche Story. De plus, Tétra Media a produit «Les Espions de la Terreur» qui se distingue pour son côté singulier, étonnant et événementiel. Cette même société de production travaille sur l’adaptation d’un format britannique d’ITV, qui sera une mini-série sur une grosse arnaque, divertissante mais avec un fond social, répartie en quatre épisodes. Côté unitaire, une comédie avec François-Xavier Demaison, « Le Nouveau », est en post-production. Il y a également un projet unitaire avec les Bodin’s qui mèneront l’enquête en Corse, qui est attendu pour être particulièrement désopilant. Globalement, la programmation à venir est éclectique.