TikTok : les créateurs de contenus américains en quête d’un avenir numérique incertain 

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«Je ne sais même plus vraiment comment me définir sans TikTok», soupire Ayman Chaudhary, une créatrice de contenus inquiète à l’idée que son application préférée ne disparaisse dimanche aux Etats-Unis par la volonté des autorités. Après des mois de tribulations judiciaires, la Cour suprême a approuvé vendredi la loi qui interdit le réseau social fréquenté par 170 millions d’Américains, au nom de la sécurité nationale, à moins que sa maison mère chinoise ne le vende. «Nous sommes plus tristes que choqués, parce qu’on s’y attendait», résume la jeune femme de 24 ans. «Mais c’est quand même très décevant que le gouvernement et les élus arrivent à se mettre d’accord pour bannir une application et pas pour voter des lois importantes, sur la santé ou l’éducation.» Il n’est pas certain que TikTok éteigne la lumière dimanche, ou pour toujours. Des racheteurs potentiels existent, mais ByteDance, le propriétaire de TikTok, a jusqu’ici systématiquement refusé de céder son joyau. Surtout, Donald Trump, qui sera investi président lundi, a dit avoir «besoin de temps» pour statuer sur le sort du réseau social, promettant de décider «dans un avenir assez proche» d’appliquer ou non la loi. En attendant, Ayman et de nombreux autres créateurs de contenus contemplent la perspective d’un avenir sans TikTok. 

«Mandarin par dépit» : «J’ai commencé pendant les confinements à cause de la pandémie et maintenant c’est comme si j’étais au chômage», raconte cette passionnée de lecture, qui recommande des livres sur la plateforme, et reçoit suffisamment de revenus de la publicité et des sponsors pour subvenir à ses besoins. Comme des milliers d’autres utilisateurs de TikTok, elle s’est créé un profil sur Xiaohongshu («Petit Livre Rouge»). Ce réseau social chinois similaire à Instagram, surnommé «Red Note» par les Américains, est en tête des téléchargements d’applications gratuites cette semaine sur l’Apple Store américain (la boutique d’applications mobiles d’Apple). «J’ai l’impression que c’est un mouvement de protestation. TikTok est interdit parce qu’il appartient à un groupe chinois, donc les gens vont sur une alternative chinoise», s’amuse-t-elle. «Vous apprenez le mandarin par dépit? Vous n’êtes pas le seul», a déclaré Duolingo, une application pour apprendre les langues étrangères, sur X mardi. «Nous avons constaté une augmentation de 216% du nombre de nouveaux apprenants de chinois (mandarin) aux États-Unis par rapport à l’année dernière à la même époque». Sur TikTok, de nombreux créateurs américains ont publié des vidéos combinant leurs moments favoris sur l’appli et des messages d’adieu appelant à les suivre sur d’autres plateformes, y compris Xiaohongshu, en se moquant ouvertement des inquiétudes de leurs élus.