Entretien avec … Emmanuel Priou, Président du Syndicat des Producteurs Indépendants (SPI) et producteur Bonne Pioche

    Dans le cadre de la Journée du Syndicat des Producteurs Indépendants (SPI) organisée mardi 25 novembre 2008, il a été fait un certain nombre de propositions pour modifier la réforme de l’audiovisuel public. L’occasion pour média+ de rencontrer Emmanuel Priou, Président du SPI, et Producteur Bonne Pioche afin qu’il nous dévoile son ressenti sur ce sujet.

    média+ : Avec la loi sur l’audiovisuel public, considérez-vous être perdant sur toute la ligne ?

    Emmanuel Priou : Je crois sincèrement en effet que nous sommes perdants sur toute la ligne. Il faut absolument réformer l’audiovisuel public car nous sommes passés dans une nouvelle ère, celle du tout numérique et du média global. Mais on ne peut pas tout modifier en quelques mois, seulement avec un semblant de concertation, une réforme aussi lourde que celle du service public audiovisuel français. La réforme engagée à déjà conduit à un net ralentissement de tout le secteur. L’activité des industries techniques dans la production de fictions télévisuelles a diminué de 30% depuis le début 2008. France Télévisions ne peux pas faire mieux en étant deux fois moins riche que la BBC et les chaînes allemandes publiques. Nous n’avons pas à mon sens une redevance assez élevée.

    média+ : Comment réagissez-vous lorsque Jean-François Copé signe pour ne pas augmenter cette redevance audiovisuelle ?

    Emmanuel Priou : Quand j’entends J-F. Copé affirmer qu’il est extrêmement fier d’avoir veillé à ce que la redevance n’augmente pas, cela m’inquiète. C’est certainement bien pour les Français mais seulement à très court terme. En augmentant la redevance de 10 centimes par jour sur une année, nous obtiendrions un financement de l’audiovisuel public qui permettrait de résoudre la quasi-totalité des problèmes dont nous débattons depuis le début. Nous proposons donc de remplacer la redevance par une taxe qui serait variable en fonction des revenus des gens.

    média+ : Mais le Gouvernement vient d’imposer aux fournisseurs d’accès à Internet une taxe de 0,9% sur leurs CA ?

    Emmanuel Priou : La taxation des fournisseurs d’accès à Internet ne les incitera pas à investir dans la création de programmes originaux français puisqu’ils seront déjà taxés. De plus, les opérateurs de télécommunication ont annoncé qu’ils répercuteront le prix de la nouvelle taxe sur le prix des abonnements payés par le public.

    média+ : Que craigniez-vous à long terme pour les producteurs indépendants ?

    Emmanuel Priou : France Télévisions à besoin d’argent pour financer d’avantage de programmes après la suppression de la publicité. Sa seule porte de sortie sera de produire en interne. Cette mesure inscrite dans le cahier des charges de France Télévisions indique qu’il pourra imposer aux producteurs indépendants d’utiliser les moyens propres de production du groupe. Cela va mettre en péril la production indépendante. De plus, le SPI a demandé purement et simplement la suppression de l’article sur la nomination du Président de France Télévisions par le pouvoir exécutif. Nous assistons là à une régression démocratique sans précédent