Chaînes TV: retour sur quelques cas marquants

Avec le temps, les chaînes télé ne ressemblent plus forcément à ce que leurs dirigeants avaient promis pour décrocher l’autorisation d’émettre. Alors que de nouvelles venues débarquent sur la TNT, retour sur quelques cas marquants.

– La privatisation de TF1 et le «mieux-disant culturel» : Pour départager les candidats lors de la privatisation de TF1, le gouvernement fixe le critère du «mieux-disant culturel». Le roi du BTP Francis Bouygues promet d’«informer, divertir, cultiver», lors de l’audition devant la Commission nationale de la communication et des libertés (CNCL) en avril 1987. Son équipe a été coachée par l’homme d’affaires Bernard Tapie, lequel assure qu’«il faut de temps en temps savoir oublier l’audimat». Patrick Le Lay, futur patron de la chaîne, donne aussi des gages: «une chaîne de télévision qui prétend être la 1ère en France ne peut pas le rester uniquement sur la diffusion des programmes les plus simples». Privatisée, TF1 s’installe comme leader incontesté en France. Son autorisation d’émettre, initialement pour dix ans, sera systématiquement renouvelée, avec des obligations rénégociées, malgré des critiques sur le respect des engagements. TF1 est plusieurs fois sanctionnée pour scènes de violence ou sadisme dans des émissions jeunesse. En 1992, le CSA lui inflige une amende de 30 millions de francs pour non-respect d’un quota d’oeuvres françaises inédites à 20h30. L’image de TF1 restera ultérieurement associée à une phrase de Patrick Le Lay, qui, sans la démentir, la jugera caricaturale. «Ce que nous vendons à Coca-Cola, c’est du temps de cerveau humain disponible».

– Les opportunités de la TNT vite délaissées : «Pathé croit au numérique terrestre même si je n’ignore rien de ses difficultés techniques et financières», assure Jérôme Seydoux en 2002. Mais le groupe de cinéma renonce aux fréquences octroyées avant même le début de la TNT, revendant ses chaînes. Le groupe AB entame lui l’aventure de la TNT en 2005, misant sur son catalogue étoffé de programmes, mais s’en désengage en 2010, faute de trouver l’équilibre. Pour Lagardère, la TNT apparaissait comme une nouvelle opportunité de décrocher une chaîne nationale après avoir manqué la privatisation de TF1 puis sa reprise malheureuse de La Cinq. Mais Lagardère renonce à utiliser la fréquence obtenue pour Match TV. S’il lance sur la TNT la chaîne musicale Europe 2 TV, future Virgin 17, il la revend en 2010 et cède plus tard sa part dans la chaîne jeunesse Gulli.

– Le direct, engagement de départ de Direct 8 : «Nous avons choisi de faire tout en direct», explique le milliardaire Vincent Bolloré, co-animant sa chaîne lors du lancement avec Philippe Labro, pilote du projet. Non sans moult soucis techniques et plans de couloirs. Les deux premières années, Direct 8 dépasse ses obligations de 7 heures quotidiennes de direct, avant de s’y tenir. En 2009, la chaîne, qui se professionnalise, obtient une modification de sa convention. Le direct diminue alors à 2 heures quotidiennes en moyenne. «Personne ne recevait la TNT au début, maintenant elle couvre 88% du territoire: notre budget a augmenté en suivant la progression», indiquait Yannick Bolloré, directeur de Direct 8. En 2011, coup de théâtre: Canal+ annonce racheter à Bolloré Direct 8 et Direct Star (ex Virgin 17), payées en actions Vivendi. En octobre 2012, la désormais D8 se positionne en chaîne premium. Trois ans plus tard, Bolloré, devenu premier actionnaire de Vivendi, accroît son contrôle sur Canal+. En 2016, D8, revenue donc dans son escarcelle, est rebaptisée C8. Elle défraie la chronique en raison des dérapages de Cyril Hanouna, animateur star de «TPMP, qui draine une large audience mais entraîne aussi des amendes à répétition de l’Arcom, pour un montant cumulé de 7,6 millions d’euros. En 2024, l’Arcom décide de ne pas renouveler la fréquence de C8 à la suite de «manquements réitérés». La chaîne disparaît de la TNT fin février 2025.