Décédé depuis près d’un quart de siècle à 24 ans seulement, le rappeur new-yorkais Notorious B.I.G. continue de fasciner; avec le documentaire «Biggie: I Got a Story to Tell», Netflix livre un portrait de «Big Poppa» par ses proches. Le film, mis en ligne ce 1er mars sur la plateforme, a été coproduit par sa mère, Voletta Wallace, et son ancien producteur, P. Diddy, et a pu puiser dans les archives vidéo de Damien Butler, alias «D-Roc», ami d’enfance de Biggie. Pas de révélation dans ce portrait, mais des morceaux de vie, des anecdotes aidant à mieux comprendre qui était Christopher Wallace, de son vrai nom, enfant de Brooklyn au charisme légendaire, dont l’image recouvre aujourd’hui plusieurs murs du quartier new-yorkais. «Sa vie a eu un impact majeur», estime P. Diddy, Sean Combs au civil, au sujet du rappeur qu’il a accompagné jusqu’au sommet. Un existence fauchée au petit matin le 9 mars 1997 par les balles d’un tireur jamais formellement identifié à ce jour, dans une rue de Los Angeles, après une fête. Les théories les plus folles circulent encore sur le mobile de ce crime. Le récent podcast «Slow Burn», très documenté, a lié le meurtre au sulfureux producteur californien Suge Knight et à la rivalité entre sa maison de disque, Death Row Records, et celle de Sean Combs, Bad Boy Records. Remontant aux origines, le documentaire se penche sur la jeunesse de Biggie, dans les quartiers de Clinton Hill et Bedford-Stuyvesant, à Brooklyn, mais aussi, chaque été, en Jamaïque. L’un de ses amis, Hubert Same, raconte que Christopher Wallace rentrait de ces séjours à Trelawny, d’où est originaire sa mère, nourri d’influences diverses, reggae, country et funk, qui ont alimenté sa culture musicale. Au fil des années, l’adolescent développe son style, prenant plus qu’à son tour le micro de façon improvisée pour des freestyles, avec sa voix profonde, dans les rues de Brooklyn, comme en témoignent des images d’archives saisissantes. Son ancien voisin saxophoniste Donald Harrison, l’un de ses mentors, se souvient de sa soif de connaissance musicale et de l’avoir familiarisé à quelques géants du jazz, Charlie Parker ou Cannonball Adderley. Pour lui, le «flow» inimitable de Christopher Wallace, capable d’accompagner méthodiquement le rythme tout en s’octroyant une grande liberté, «équivaut aux plus belles qualités d’un solo de batterie bepop», mouvement phare du jazz des années 50. S’il valorise clairement l’image de Biggie, le film évoque aussi longuement les aspects plus sombres du personnage, notamment sa brève carrière de dealer de drogue. C’est durant cette période qu’il perdra l’un de ses plus proches amis, Olie, tué par balles, une disparition qui le marquera à jamais. Longuement interrogée pour le documentaire, sa mère décrit les tensions qu’a fait naître la drogue entre son fils et elle, avant qu’il ne lui annonce un jour son intention de renoncer pour se consacrer uniquement à la musique. «Tu ne peux pas faire les deux», trafic et musique, se souvient lui avoir dit P. Diddy, qui se faisait appeler Puff Daddy à l’époque, avant qu’il ne renonce à la rue. «Biggie a explosé d’un seul coup», rappelle le producteur. «Nous ne savons pas de quelle planète rap il est venu». Notorious B.I.G. n’aura sorti qu’un seul album de son vivant, «Ready To Die», son deuxième disque, «Life After Death», ayant été publié 16 jours après sa mort. Le documentaire montre cette figure imposante de près de 1,90 m, pesant plus de 150 kg, en homme généreux, désireux de faire profiter son entourage de son succès. «Il avait un talent qui a sauvé la vie de beaucoup de gens», se souvient le rappeur Lil’ Cease, un proche, «mais pas la sienne».