Chili: le plus grand télescope au monde sort lentement de terre

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L’Extremely Large Telescope (ELT), le plus puissant instrument optique jamais construit qui augmentera considérablement la capacité d’observation des astronomes, sort lentement de terre dans le nord du Chili, un des endroits les plus propices pour se tourner vers les étoiles. Ce nouvel «oeil sur le ciel», qui viendra s’ajouter à partir de 2027 aux puissants instruments d’observation déjà en service dans le désert d’Atacama, permettra de multiplier par 5.000 la capacité d’observation actuelle, et de pointer le regard vers des lieux jusqu’alors inconnus pour répondre aux questions encore ouvertes sur les origines de l’Univers. «Il y a certaines questions scientifiques auxquelles nous aimerions répondre et ces questions induisent la nécessité d’une technologie qui nous aide à y répondre», explique l’astronome chilien Luis Chavarria, de l’Observatoire européen austral (ESO) qui finance la construction de l’ELT. «L’astronomie travaille toujours à la limite de la technologie, à la limite de la détection, à la limite de tout ce que ces merveilleux instruments peuvent fournir», dit-il. Les instruments d’observation actuels, tels que le Very Large Telescope (VLT) – l’instrument le plus puissant actuellement en service – et l’ALMA, le plus grand radiotélescope du monde, tous deux situés dans le nord du Chili, sont capables de répondre aux questions que les scientifiques se posaient il y a 3 décennies. Mais les limites de la connaissance ont été repoussées, obligeant la construction d’instruments encore plus performants, comme l’ELT, qui sera installé à plus de 3.000 mètres d’altitude sur la colline d’Armazones, à une vingtaine de kilomètres du VLT, propriété de l’ESO au beau milieu du désert. «C’est un immense exploit technologique que de pouvoir disposer des niveaux de précision nécessaires pour pouvoir utiliser ces télescopes au maximum (…), quelque chose qui repousse les barrières de la technologie», s’enthousiasme Luis Chavarria. Le coût de construction de l’énorme ensemble de 2.800 tonnes est estimé 1,3 milliard d’euros. La phase des «grands travaux de génie civil» est pour l’heure achevée à 40%, avec la construction du mur d’enceinte soutenant le dôme qui supportera le panneau miroir. «L’ELT est l’évolution du VLT (…) Il est évident que c’est une échelle complètement différente de tout ce qui a été fait auparavant, donc il a des exigences (technologiques) très différentes», d’où la durée nécessaire aux travaux, a expliqué Guido Veccia, responsable du site. Les télescopes optiques actuels, d’un diamètre de 8 à 10 mètres, ont surtout permis aux scientifiques de découvrir les exoplanètes, ces planètes en orbite autour d’autres étoiles où se concentrent les recherches de traces de vie. Mais pour approfondir leur connaissance, il faut des instruments d’observation plus précis, donc plus grands, capables de recueillir une plus grande quantité de lumière. Avec son diamètre de 39 mètres, l’ELT «recueillera 15 fois plus de lumière que les télescopes optiques aujourd’hui en fonction et fournira des images 15 fois plus nettes que celles du télescope spatial Hubble», selon l’ESO, organisation intergouvernementale pour l’astronomie en Europe, financé annuellement à hauteur de 198 millions d’euros par 16 pays européens membres. «C’est un projet d’avenir qui nous permettra d’atteindre d’autres distances dans l’Univers», indique Susy Solis, géologue et assistante technique pour la construction de l’ELT. Les caractéristiques climatiques du désert d’Atacama et son temps aride, qui permettent des observations dans un ciel parfaitement clair une très forte proportion (90%) de nuits de l’année, en font un lieu particulièrement propice aux observations astronomiques.