Conclave et cardinaux : les contenus prolifèrent sur les réseaux sociaux

Vidéos présentant les cardinaux en pilotes de Formule 1 et image virale de Donald Trump en tenue papale, les contenus autour du conclave, qui débute mercredi à Rome pour élire le prochain pape, prolifèrent sur les réseaux sociaux. Vraisemblablement générée par l’IA, une photo en couleur, diffusée par le président américain sur son réseau Truth Social samedi, le montre l’air solennel dans un fauteuil, le visage fermé, habillé de la soutane blanche du pape, coiffé de la mitre, arborant l’imposante croix en or autour du cou, main gauche posée sur sa cuisse et index droit levé vers le ciel. Cette image, vivement critiquée, n’est qu’un exemple des contenus, souvent humoristiques, qui inondent Internet depuis la disparition du pape François le 21 avril. En tout, plus de 1,3 million de tweets ont été publiés autour du conclave depuis le décès du souverain pontife tandis que ce sujet cumule 363,3 millions de vues sur TikTok, réseau particulièrement populaire chez les jeunes, d’après la plateforme de veille Visibrain. Un jeu en ligne a même vu le jour. Baptisé «Fantapapa», il permet de choisir ses cardinaux favoris et de faire ses pronostics sur le modèle des paris sportifs. Une élection à huis clos dans le monument qu’est la chapelle Sixtine, un suspense haletant, une fumée noire ou blanche: cette forte «symbolique visuelle est propice aux formats narratifs des réseaux sociaux», estime Refka Payssan, doctorante et chercheuse en Sciences de l’information et de la communication. «Le conclave, c’est à la fois des dorures, du protocole, de l’apparat mais aussi du secret et du mystère», savamment entretenu par le Vatican, abonde Stéphanie Laporte, fondatrice d’OTTA, agence de conseil en stratégie numérique. Et «les jeunes aiment spéculer», poursuit-elle. «Sur les réseaux, tout le monde a un avis, une opinion et tout le monde veut décrypter les infos, chercher des indices, savoir quel cardinal va devenir pape. C’est presque un «escape game»» pour l’experte. Par ailleurs, il y a «cette curiosité pour l’histoire en direct», le conclave étant perçu comme un événement rare et historique, le dernier ayant eu lieu il y a 12 ans, rappelle Refka Payssan. Au-delà des catholiques, «les jeunes sont très conscients de l’influence du pape sur des centaines de millions et même des milliards de personnes, que ce soit sa position sur la contraception ou l’environnement», note Stéphanie Laporte. L’intérêt suscité par le conclave reflète aussi la mue numérique opérée par le Vatican ces dernières années pour séduire les jeunes générations. Le compte officiel du pape sur X, @pontifex, créé en 2012 par Benoît XVI mais surtout utilisé par François, qui se décline en 9 langues, totalise 50 millions d’abonnés, tandis que le compte Instagram du défunt pape en réunissait plus de dix millions. Avec le soutien de l’Eglise, de nombreux cardinaux ont aussi investi le champ des réseaux sociaux, devenant pour certains des figures d’Internet. Tarcisio Isao Kikuchi, archevêque de Tokyo, multiplie les «selfies» pour ses 2.900 abonnés sur Instagram et 1.700 amis sur Facebook, dont un avec ses pairs dans un bus en route pour prier sur la tombe du pape François. Timothy Dolan, archevêque de New York (près de 300.000 abonnés sur X et 55.000 sur Instagram), publie régulièrement des vidéos où il raconte ses journées à Rome avant le conclave, sans révéler toutefois le contenu des discussions en cours. Connu pour ses positions modérées, le cardinal philippin Luis Antonio Tagle fait un tabac grâce à des vidéos où on le voit faire du karaoké. Les cardinaux sont «des personnages absolument fascinants qui sont entrés dans la «pop culture»», alimentant l’engouement du public, souligne Stéphanie Laporte. D’autant plus avec des oeuvres comme le livre «Anges et Démons» de Dan Brown, adapté au cinéma en 2009, ou plus récemment le thriller «Conclave», de l’Allemand Edward Berger, qui connaît un succès fulgurant en salles et sur les plateformes de streaming.