Empêcher la diffusion de la chaîne russe RT France, juridiquement et techniquement possible, mais compliqué

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Empêcher la diffusion d’une chaîne de télévision en France, comme de plus en plus de voix l’exigent pour RT France, après l’invasion de l’Ukraine par la Russie, est juridiquement et techniquement possible, mais compliqué.
Les chaînes françaises de télévision doivent, pour être autorisées à émettre, signer une convention avec l’Autorité de régulation des médias, l’Arcom, anciennement appelé Conseil supérieur de l’audiovisuel (CSA). C’est le cas de RT France, version en français de la chaîne russe d’informations en continu RT (ex-Russia Today).
Chaque convention est unique mais elles comportent toutes certaines obligations, comme le pluralisme et l’honnêteté de l’information. Pour RT, il y a notamment, en annexe de sa convention, le détail de la composition de son comité d’éthique, qui permet au régulateur de savoir qui y siège.
En pratique, dans le contrôle a posteriori qu’il exerce de sa propre initiative ou s’il est saisi d’une plainte, l’Arcom veille notamment au respect des obligations dans les domaines de l’incitation à la haine et à la violence, de la protection des mineurs ou du respect de la dignité humaine.
Après visionnage de séquences éventuellement problématiques d’une chaîne, le régulateur français instruit un dossier qui peut déboucher sur une constatation de manquements. La réponse est graduée en fonction de la gravité du manquement: lettre de rappel à la réglementation, courrier de mise en garde et enfin mise en demeure. Si un manquement est toujours constaté, alors une procédure de sanctions peut s’ouvrir, et déboucher potentiellement sur une interdiction de diffusion.
L’Arcom s’est dit jeudi extrêmement vigilant quant aux informations diffusées par RT en français et ne pas exclure, en cas de manquements, un processus de suspension de la chaîne russe.
Dans un cas exceptionnel -qu’il n’a pas écarté concernant RT jeudi-, l’Arcom peut passer par une procédure plus rapide: la saisine du Conseil d’Etat afin qu’il ordonne en référé la cessation de la diffusion de la chaîne par un opérateur.
C’est ce qu’il avait fait en 2004, après la diffusion par la chaîne libanaise Al-Manar de propos antisémites dans son journal.
Le CSA – ancêtre de l’Arcom – avait alors obtenu que le Conseil d’Etat, quelques jours après les faits, ordonne en référé la cessation par l’opérateur satellitaire Eutelsat de la diffusion d’Al-Manar.