Eurovision : Alvan & Ahez, une fusion entre électro et chant breton

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Cette chanson, «c’est un peu la B.O. de notre rencontre». Le groupe Alvan & Ahez, qui fusionne électro et chant breton, représentera la France le 14 mai à Turin (Italie) à l’Eurovision, avec un titre féministe inspiré d’une légende bretonne. Quand on rencontre les quatre membres de cette formation lauréate des éliminatoires français, c’est la journée internationale pour les droits des femmes. Ça tombe bien vu le thème de la chanson «Fullen». ««Fullen», ça veut dire étincelle et jolie fille en breton, avec pour cette dernière expression une connotation un peu péjorative, comme pour dire fille légère, et on voulait prendre cette expression à contre-pied et porter un discours émancipateur pour les femmes», expose Marine Lavigne, une des trois jeunes femmes du groupe. «On chante l’histoire d’une jeune fille qui va danser à la nuit tombée autour d’un feu de joie, elle emmène tout le monde avec elle en repoussant les regards médisants», poursuit-elle. La trame du morceau est inspiré d’un légende bretonne, qui finit mal dans la version originale. Le garçon du groupe, Alexis Morvan, évoluait à l’origine de son côté avec le projet électro Alvan. Comment s’est faite la jonction avec Ahez, le groupe des filles, aperçu en festival et fest-noz ? «En bons Rennais, on s’est rencontrés au bar (rires) avec Marine, on était là avec nos groupes de potes respectifs, on s’est bien entendus, on en est venus très vite à parler de nos passions, de la musique», raconte le barbu tatoué. «Je voulais utiliser le chant traditionnel pour une musique, j’avais essayé avec un enregistrement de mon arrière-grand mère chantant en breton, mais ce n’était pas fou-fou», développe-t-il. «Marine m’a dit qu’elle chantait en breton, je lui ai dit que j’avais une «prod» dans le tiroir qui pourrait aller, elles sont venues chez moi toutes les trois, ont aimé le morceau, Marine a écrit le texte en deux jours, c’était plié». Quand Barbara Pravi l’avait emporté dans les éliminatoires l’an passé, elle vivait déjà de la musique depuis plusieurs années et avait déjà signé sur un label pour son premier disque, alors en préparation. Chez Alvan & Ahez, seul Alexis Morvan a les deux pieds dans la musique. Les vies des trois jeunes femmes vont être joyeusement bousculées par l’objectif de Turin le 14 mai, show retransmis devant plus de 200 millions de téléspectateurs. Marine Lavigne est étudiante, «en master espagnol»: l’Eurovision «bouleverse les plans (rires), après le diplôme, je comptais me consacrer à la musique, là le mémoire va en prendre un coup (rires), même si je vais essayer de mener les deux de front». Sterenn Le Guillou est «coordinatrice enfance et jeunesse»: «ça va chambouler le rythme de mon CDI à 35 heures, mais on est terriblement chanceux de pouvoir vivre ça». L’autre chanteuse, au même prénom, Sterenn Diridollou, travaille dans la communication, culturelle et événementielle. Leur existence n’est déjà plus la même. Des artistes bretons de renom les ont félicités, Dan Ar Braz, Alan Stivell ou encore Nolwenn Leroy. Dan Ar Braz s’était produit à l’Eurovision en 1996 en breton, langue que les trois chanteuses ont appris dans le réseau des écoles Diwan (qui pratique l’immersion en breton). Alexis Morvan s’y met tout juste. Mais il a un autre atout. «L’attaché de presse de mon projet Alvan possède le plus gros drapeau breton du monde -il fait la taille d’un stade (rires)- et il m’a dit qu’il le ramènerait à Turin». Ce ne devrait pas être le seul «Gwenn ha du» (drapeau breton) dans le Piémont. Il y en a toujours dans les festivals de musiques actuelles, même sans artistes bretons sur scène, et la culture celtique est très présente sur le vieux continent. Comme le dit Marine Lavigne: «les Bretons sont partout, on est un peuple voyageur, qui a laissé de grandes empreintes et des liens de fraternité».