Ex-star de la télé israélienne, Yaïr Lapid enfile le costume de Premier ministre d’Israël

370

Ancienne star de la télé israélienne, le centriste Yaïr Lapid a déconcerté les sceptiques au point d’enfiler le costume de Premier ministre, mais il sera rapidement rattrapé par des défis de taille: l’Iran, l’inflation et Benjamin Netanyahu qui rêve de le déloger du pouvoir. Avec la dissolution du Parlement, votée jeudi, M. Lapid succédera officiellement vendredi à Naftali Bennett en vertu d’un accord de partage de pouvoir qui consacre dix ans d’engagement politique.Lorsqu’en 2012 ce journaliste vedette quitte les plateaux pour lancer son parti Yesh Atid («Il y a un futur»), ses détracteurs lui reprochent de jouer sur sa photogénie et ne le prennent pas au sérieux. A l’époque, sa ville de Tel-Aviv sort d’un mouvement de contestation sur le problème de l’accès au logement et de la vie chère.Yaïr Lapid n’est pas indifférent à la cause. Il mise sur un discours économique axé sur les problèmes de la classe moyenne pour s’imposer dans le jeu politique et faire de  son parti naissant la 2ème force politique derrière le Likoud (droite) de Benjamin Netanyahu, dès les élections de janvier 2013. Plus de dix ans plus tard, Yaïr Lapid est toujours là. Et son parti a contribué en juin 2021 à mettre un terme à 12 ans de règne sans discontinuer de Benjamin Netanyahu, en formant avec son ami Naftali Bennett (du parti Yamina, droite radicale) une coalition unique dans l’histoire d’Israël, réunissant des formations de droite, du centre et de gauche, et pour la 1ère fois, un parti arabe. Mais la coalition a implosé ces dernières semaines. Et MM. Bennett et Lapid ont appelé à la dissolution du Parlement pour convoquer de nouvelles élections, les 5èmes en 3 ans et demi pour Israël qui n’arrive pas à mettre un terme à la plus longue crise politique de son histoire. En vertu d’un accord de partage du pouvoir, Naftali Bennett a cédé son rôle à Yaïr Lapid qui sera à la fois Premier ministre et chef de la diplomatie d’ici à la formation d’un nouveau gouvernement, après les législatives fixées au 1er novembre. D’ici cette échéance, M. Lapid ne devrait pas chômer. «Les défis auxquels nous sommes confrontés ne prennent pas de pause parce que nous avons une élection dans quelques mois. Nous devons juguler l’inflation», à un pic en plus d’une décennie de 4% en rythme annuel, et faire face à l’Iran, ennemi juré d’Israël, et son allié le Hezbollah libanais, a-t-il déclaré récemment. La question d’un possible nouvel accord entériné par Washington sur le programme nucléaire iranien devrait être au coeur de la visite mi-juillet du président américain Joe Biden en Israël. Né en novembre 1963 à Tel-Aviv, métropole où il concentre ses appuis, Yaïr Lapid est le fils du défunt journaliste et ancien ministre de la Justice Tommy Lapid. Terrain ou fiction, le journalisme imprègne la jeunesse de Yaïr Lapid qui signe ses premiers textes pour le quotidien Maariv, décrochant ensuite une chronique au Yediot Aharonot, titre le plus vendu du pays, ce qui va le faire connaître du grand public.Parallèlement, il poursuit ses activités de touche-à-tout insatiable: il boxe en amateur, s’adonne aux arts martiaux, écrit des romans policiers et des séries télé, compose et interprète des chansons et joue même au cinéma. Mais c’est à la télévision – il devient dans les années 2000 présentateur du talk-show le plus suivi du pays – qu’il s’impose comme l’incarnation de l’Israélien moyen, posant invariablement à ses invités sa question fétiche: «Qu’est-ce qui est israélien à vos yeux?». Patriote, libéral, laïc, l’homme parvient à rassembler au centre de l’échiquier politique mais reste raillé par les milieux juifs orthodoxes, des alliés clés de Benjamin Netanyahu, avec lesquels il tente néanmoins de nouer des liens. Divorcé, remarié, Yaïr Lapid est le père de trois enfants.