Hongrie: la Commission européenne dénonce la suspension d’une radio indépendante

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La Commission européenne a dénoncé mercredi la suspension de la première station de radio indépendante de Hongrie, une décision qui «accroît ses préoccupations» sur «la liberté et le pluralisme des médias» dans ce pays membre de l’UE. «Nous avons exprimé nos préoccupations concernant la liberté et le pluralisme des médias en Hongrie dans des rapports sur l’Etat de droit. Le cas de la Klubradio ne fait qu’accroître ces préoccupations», a affirmé un porte-parole de l’exécutif européen. La Commission est «en contact avec les autorités hongroises afin de garantir que Klubradio puisse continuer à fonctionner légalement», mais elle est prête «à prendre des mesures si cela est possible et nécessaire», a-t-il averti. Klubradio, au contenu souvent critique vis-à-vis du gouvernement souverainiste de Viktor Orban, doit cesser d’émettre dimanche après avoir été déboutée mardi de son appel pour garder sa licence. La radio, qui doit déposer un ultime recours devant la Cour suprême, a dénoncé «une décision politique, honteuse et lâche» du tribunal municipal de Budapest.En septembre dernier, le Conseil des médias (NMHH), une tutelle créée en 2011 sous l’égide de M. Orban, avait refusé de prolonger l’autorisation d’exploitation de la radio, qui arrive à son terme le 14 février. Le puissant NMHH affirme que la station a soumis, à deux reprises en un an, des documents administratifs avec retard.Le porte-parole de la Commission a rappelé que «les conditions d’utilisation» et les procédures d’octroi, de retrait ou de renouvellement» d’une fréquence radio étaient «soumises aux règles communautaires en matière de télécommunications» et devaient respecter des «principes de proportionnalité et de non-discrimination». «Les médias doivent pouvoir travailler librement et en toute indépendance partout dans l’Union européenne», a-t-il insisté. Dans un billet de blog mercredi, le porte-parole du gouvernement hongrois, Zoltan Kovacs s’est défendu de toute «répression du gouvernement contre la liberté de la presse». «Certains voudraient vous faire croire que Klubradio, supposée être «l’une des dernières stations de radio indépendantes», a été «fermée» par le gouvernement. En fait, c’est la direction de la station de radio elle-même qui est responsable de sa disparition, car elle a ignoré de manière flagrante les règles de diffusion et s’est mise à dos la justice», écrit-il. «Le gouvernement n’a ni le droit, ni la volonté, ni la possibilité d’interférer dans les litiges juridiques des acteurs du marché privé de l’autorité des médias et des tribunaux. Je pense que c’est ce que certains appellent l’État de droit», a-t-il insisté. Klubradio, qui avait commencé à émettre dans les années 1990, a été confrontée ces dernières années à une série d’obstacles et de batailles juridiques pour pouvoir poursuivre son activité.De nombreux médias indépendants ont dû mettre la clé sous la porte ou ont été repris par des proches du pouvoir en Hongrie, pays qui occupe actuellement la 89e place sur 180 au classement mondial de la liberté de la presse, publié par l’ONG Reporters sans frontières (RSF). «Avec le soutien du système judiciaire hongrois, le Conseil des médias (NMHH) a utilisé un prétexte administratif pour porter un coup majeur au pluralisme des médias», a estimé mercredi Pavol Szalai, responsable chez RSF dans la zone. «La Commission européenne ne doit plus tarder à enquêter sur l’indépendance du Conseil», a-t-il réclamé dans un communiqué. Fin 2018, Bruxelles a déclenché une procédure exceptionnelle pour risque de «violation grave» des valeurs de l’UE, pointant notamment l’appauvrissement du pluralisme médiatique en Hongrie.