La Cour européenne des droits de l’homme (CEDH) a admis mardi que les Etats pouvaient procéder à des surveillance de masse des communications, mais a condamné la Suède et le Royaume-Uni pour ne pas avoir garanti «de bout en bout» le respect des droits humains dans ce domaine.
En raison de certaines carences, le régime suédois d’interception en masse de communications «n’offre pas une protection adéquate et effective contre l’arbitraire et le risque d’abus», a considéré la Grande chambre de la CEDH, la formation suprême de l’instance judiciaire du Conseil de l’Europe.
En conséquence, 15 juges (sur 17) ont estimé que la Suède avait violé l’article 8 de la Convention européenne des droits de l’homme qui protège le «droit au respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance».
La CEDH insiste sur le fait que les systèmes de collecte en masse de renseignement par les Etats doivent apporter des «garanties de bout en bout» sur le respect de la vie privée, c’est-à-dire que la nécessité et la proportionnalité des mesures prises «devraient être appréciées à chaque étape du processus». La CEDH avait été saisie en 2008 par une organisation à but non lucratif suédoise, Centrum för rättvisa, qui intervient dans des litiges, contre l’Etat notamment, sur le respect des droits et des libertés.
Cette organisation considérait qu’il y avait un risque que ces communications, par mail, téléphone ou télécopie, sur des sujets «sensibles» puissent être interceptées dans le cadre d’activités de renseignement.
La CEDH souligne que le recours par un Etat à un régime d’interception en masse de télécommunications n’est pas en soi contraire à l’article 8 de la Convention, mais que, «au vu de l’évolution constante des technologies de communication modernes», ces activités doivent dès le départ être soumises à «l’autorisation d’une autorité indépendante» et ensuite «faire l’objet d’une supervision et d’un contrôle indépendant».
La CEDH a condamné la Suède à verser 52.625 euros à l’organisation requérante.
Dans un autre arrêt également rendu mardi, la Grande chambre de la CEDH a aussi condamné le Royaume-Uni pour avoir violé l’article 8 avec son régime de surveillance de masse auprès des fournisseurs de services de communication.
Mais ce régime à l’époque des faits litigieux reposait sur une loi de 2000, qui a été remplacée par une autre loi en 2016.
Dans cette affaire, les requérantes étaient des journalistes et des organisations de défense des droits humains, qui considéraient qu’après les révélations du lanceur d’alerte Edward Snowden, leurs communications «ont pu être interceptées ou recueillies par les services de renseignement britanniques».