La journaliste Sonia Mabrouk défend son approche des médias face aux critiques sur ses positions politiques 

Figure de CNews et d’Europe 1, la journaliste Sonia Mabrouk revendique de «partager des convictions» dans ses livres et de l’»émotion» à l’antenne, mais se défend de «servir toute idéologie» au sein des médias de la sphère Bolloré. De retour en septembre à l’antenne après un congé maternité, la Franco-Tunisienne de 46 ans assure en parallèle la promotion de son dernier ouvrage, «Et si demain tout s’inversait» (Fayard), «récit romancé» qui imagine une inversion des flux migratoires de l’Europe vers le Maghreb. Immigration, identité, «épuisement» de la civilisation occidentale minée par le «wokisme», racines chrétiennes de la France… Elle déroule dans ce livre des thématiques qu’elle prise, elle qui promeut l’assimilation. Une notion «difficile» à «aborder aujourd’hui sans être +extrême-droitisé+», déplore Sonia Mabrouk, qui a grandi à Tunis et obtenu la nationalité française en 2010. L’assimilation, c’est «demander à l’étranger, à celui qui arrive, de partager les mêmes codes culturels et les mêmes moeurs que le pays d’accueil», sans «effacer ses origines», explique-t-elle. Elle-même a appelé sa fille Soraya, «prénom arabe, d’origine persane» de sa mère défunte. «Egérie de la +droitosphère+» pour Libération, «musulmane laïcarde» qui «a viré de bord» après avoir plu à la «gauche universaliste» selon l’hebdomadaire Franc-tireur… La journaliste affable rejette «toute influence» du milliardaire conservateur Vincent Bolloré, dont les médias sont régulièrement accusés par la gauche de promouvoir des idées d’extrême droite. «Je ne sers aucune idéologie. (…) Je n’ai aucun projet politique, si ce n’est de pouvoir écrire, partager avec les lecteurs des convictions mais sur des sujets sur lesquels je ne veux pas du tout convaincre», assure celle qui a démarré sa carrière au magazine Jeune Afrique en 2005. Diplômée de l’Institut des Hautes Etudes Commerciales à Tunis, où elle a enseigné cinq ans, et de la Sorbonne à Paris, elle n’a aucune expérience journalistique lorsqu’elle convainc Béchir Ben Yahmed, fondateur franco-tunisien de Jeune Afrique, de la prendre à l’essai. Son nom de famille, associé à la «grande bourgeoisie d’élite» tunisienne – son grand-père a été ministre du président Habib Bourguiba et son oncle ambassadeur de Tunisie en France -, «a dû jouer», estime François Soudan, directeur de la rédaction du titre. 

«Double casquette» : Il se souvient d’une «fille appliquée», «intelligente» et «manifestement ambitieuse, avec une grande appétence pour des sujets de société». Et de son «talent» pour les entretiens, illustré par une interview de Brice Hortefeux, ancien ministre lors de la présidence de Nicolas Sarkozy. «C’est moi qui étais censé diriger l’interview et, très rapidement, je l’ai vu prendre les rênes», relate M. Soudan, louant sa «capacité à poser des questions très incisives». De quoi convaincre Jean-Pierre Elkabbach, vétéran du journalisme politique qui la fait venir en 2009 à Public Sénat, où elle anime la tranche 22H-23H30 tout en intégrant Europe 1 en 2013. L’ancien patron de la chaîne et actuel PDG de LCP, Emmanuel Kessler, vante sa «grande capacité de travail». Il lui reconnaît un «attachement aux valeurs républicaines», qu’elle «affirme peut-être avec un positionnement politique un peu plus partisan» depuis qu’elle a rejoint CNews, en 2017. «Par rapport aux autres journalistes de CNews et d’Europe 1, (…) elle garde une forme de professionnalisme dans l’interview», estime la députée EELV Sandrine Rousseau.