La technologie a contribué à nous faire perdre le sommeil, mais peut-elle nous le rendre ? Des entrepreneurs insomniaques, ronfleurs invétérés ou amoureux des siestes ont mis au point toutes sortes de gadgets électroniques pour mieux dormir. «Nous avons ici le premier traqueur à intelligence artificielle (IA) de sommeil et d’ondes cérébrales au monde, capable d’améliorer le sommeil profond et le temps d’endormissement», présente Kimi Doan, responsable des investissements chez Earable neuroscience. Elle est venue présenter au salon de la tech de Las Vegas (CES) le «Brainband», commercialisé depuis peu, pour près de 500 dollars. Conçu dans des matières souples et douces, il se porte sur la tête comme une couronne. Ses capteurs plaqués or analysent l’activité cérébrale en temps réel et ses enceintes jouent de la musique, des aides à la méditation ou du bruit blanc, selon les besoins détectés. «Si vous vous réveillez au milieu de la nuit, l’IA va automatiquement trouver le contenu audio approprié pour vous aider à vous rendormir», précise Kimi Doan. Phénomène naturel et vital, le sommeil s’est dégradé à cause de problèmes de santé et/ou du stress de la vie moderne. Aux Etats-Unis, d’après la Sleep Foundation, près d’un tiers des adultes dorment moins de 7 heures par nuit, le minimum recommandé pour éviter d’aggraver les risques de maladies cardiovasculaires et d’obésité. Sans compter l’impact sur la productivité. «La fatigue au travail coûte environ 136 milliards de dollars par an aux entreprises américaines», ajoute l’organisation. En 2024, la «Dormeuse, amas doré d’ombres et d’abandon» de Paul Valéry fait défiler des contenus sur son téléphone portable avant de dormir, au détriment de son repos. La réponse de la tech: des accessoires pour analyser son sommeil et des matelas connectés, qui gagnent en capacité à intervenir et interagir, grâce à l’IA. PranaQ va ainsi lancer en avril TipTraQ, un capteur biométrique à porter au bout du doigt la nuit, accompagné d’une application mobile, pour 200 dollars. Les utilisateurs pourront y consulter les rapports sur les phases de leur sommeil et échanger avec un chatbot à base d’IA générative, entraîné spécialement sur un corpus de textes scientifiques. L’entreprise basée à Taiwan espère obtenir bientôt un agrément médical pour son appareil dans le suivi de l’apnée du sommeil, souvent responsable des ronflements, un trouble dont souffrent deux des cofondateurs. Jonathan Berent, fondateur de NextSense, a aussi des ambitions médicales pour ses oreillettes, initialement imaginées pour dépister et suivre l’épilepsie. Quand elles seront mises en vente d’ici un an pour 130 dollars, elles serviront d’abord à analyser et améliorer la qualité du sommeil. «Nous avons trouvé un nouveau moyen d’amplifier les ondes du sommeil profond, les plus réparatrices», indique cet ancien ingénieur de Google. «Lorsque vous jouez du bruit rose (ondes basses fréquences comme les vagues, ndlr) pendant cette phase, le cerveau se réfugie dans un stade de sommeil plus profond». «Toutes ces données nous donnent l’impression que nous pouvons contrôler notre sommeil. Et pour certaines personnes, c’est utile et motivant», note Wendy Troxel, scientifique comportementale de la Rand Corporation. «Mais la réalité du sommeil, c’est que plus vous travaillez pour l’obtenir, plus il vous échappe. Et toutes ces mesures peuvent provoquer de l’anxiété, un état antithétique au sommeil», continue-t-elle. Pour se détendre, les insomniaques peuvent adopter une Moonbird à 200 dollars. Cette balle antistress connectée se gonfle et se dégonfle dans la main d’une façon envoûtante, pour guider des exercices de respiration propices à l’endormissement.