Le PDG d’Orange, Stéphane Richard, sous pression maximale après la panne «rarissime» des numéros d’urgence

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Des excuses publiques, le courroux de l’exécutif, et la menace judiciaire: le PDG d’Orange, Stéphane Richard, est sous pression maximale après la panne «rarissime» des numéros d’urgence, alors qu’il n’a toujours pas indiqué son souhait de briguer un nouveau mandat, qui s’achève en mai 2022. Le point d’orgue d’une série noire. Déjà dans le viseur du Premier ministre Jean Castex, après la controverse sur la qualité du réseau cuivre dans certaines zones isolées du territoire, Stéphane Richard vit l’une des crises les plus graves depuis sa nomination à la tête de l’ex-France Télécoms en février 2011. La panne, qui a empêché ou ralenti pendant plusieurs heures mercredi l’accès aux numéros de secours (15/17/18/112), a précipité le retour en France du ministre de l’Intérieur, Gérald Darmanin, alors en déplacement en Tunisie. Sommé de s’expliquer par le gouvernement, qui a dénoncé des «dysfonctionnements graves et inacceptables» et a lancé un audit, Stéphane Richard a même été convoqué à Beauvau pour donner des éclaircissements, alors que l’incident pourrait être lié à la mort d’au moins quatre personnes dont un jeune enfant, selon un bilan provisoire. Entre mea culpa public et exercice de transparence, la tentative de reprise en main du dirigeant s’est déroulée en trois temps: un message sur Twitter, deux entretiens dans les médias, et l’annonce vendredi matin du lancement d’une enquête interne – à son initiative – dont les conclusions sont attendues sous sept jours. «Il ne s’agit pas du tout d’une coupure totale ou d’une panne géante comme celle qu’on a connue il y a quelques années, en 2012, sur le réseau mobile. Il y a eu des dysfonctionnements, il y a un certain nombre d’appels qui n’ont pas pu aboutir mais, lorsque les personnes réitéraient 2, 3, 4, 5 fois leur appel, dans 8 cas sur 10 depuis le mobile, 9 cas sur 10 depuis le fixe, ils arrivaient à obtenir ces services d’urgences», a-t-il notamment exposé jeudi dernier au JT de 13H de TF1. Reste que la pression politique, déjà majeure sur l’annonce du plan cuivre, s’est encore accrue davantage sur ses épaules avec cette panne d’ampleur, alors que l’Etat est le premier actionnaire d’Orange avec 22,95% du capital et 29,43% des droits de vote en assemblée générale. De quoi laisser augurer une reprise en main de l’Etat sur la future gouvernance du groupe? Plusieurs sources évoquent une possible dissociation des fonctions de président et directeur général d’Orange pour le prochain mandat, dont les contours pourraient être dessinés dès janvier 2022. «C’est une doctrine constante de l’Etat dans les entreprises publiques», explique Sébastien Crozier de la CFE-CGC (premier syndicat d’Orange), évoquant les exemples de Renault après le départ de Carlos Ghosn ou encore de Gérard Mestrallet, passé en 2016 de PDG à président non exécutif chez Engie. «Si on gardait Stéphane Richard comme président, cela voudrait dire qu’il faudrait aller chercher un directeur général à l’extérieur», ajoute-t-il. Autre potentielle menace sur l’avenir de Stéphane Richard chez Orange: l’horizon judiciaire. Relaxé en première instance dans l’affaire de l’arbitrage Tapie, M. Richard, qui était à l’époque directeur de cabinet de la ministre de l’Économie Christine Lagarde, voit le procès en appel, qui a débuté mi-mai, revenir comme une épée de Damoclès. Dans ce dossier ouvert en 2008, Bernard Tapie et ses cinq co-prévenus, dont le patron d’Orange, sont soupçonnés d’avoir vicié un arbitrage privé, censé mettre fin au long conflit opposant l’entrepreneur et sa banque historique autour de la revente d’Adidas. Le ministère public a requis mercredi dernier 3 ans dont un ferme et 100.000 euros d’amende contre Stéphane Richard, poursuivi pour complicité de détournement de fonds publics.